07/10/2010
L'heure de vérité (juillet 1994)
J'ai lu ici et là - également sur Hautetfort - des témoignages incroyables, qui me disent entre autres qu'ils n'ont pas osé aller trop loin avec l'objet de leur pensées.
On m'a souvent dit, quand j'ai eu le malheur de me confier, que finalement, je ne sais pas ce qu'aurait pu donner une vie à deux. Je ne connaissais que les "bons côtés" de cette relation, mais je n'avais pas subi le quotidien.
Ce fameux quotidien qui tue la majorité des couples.
Mais aussitôt je leur rétorquerai juillet 1994.
Juillet 1994 qui sera l'épreuve de vérité à ce sujet.
Toujours en mai, mon épouse fait une nouvelle crise. Inexpliquée celle-là, contrairement aux précédentes.
Nathalie, qui a une horreur absolue des hôpitaux, viendra quand même lui apporter un bouquet de fleurs. Nathalie qui elle aussi est écartelée, à la pensée de trahir cette femme qu'au fond elle estime.
Et chef adoré continue son travail de sape. Sans qu'on lui ait rien demandé, il introduit Windows dans le boulot. Double conséquence : nos poèmes seront écrasés si on ne les sauvegarde pas, et surtout, tout est à apprendre ! A commencer par admettre qu'une "souris" peut remplacer un clavier .
Pour vous faire une idée, c'est un peu la situation des conducteurs de locomotives à vapeur qui ont dû se reconvertir aux machines diesels ou électriques. Le métier était pourtant le même, mais la façon de le faire avait radicalement changé.
Beaucoup de démissions, de dépressions, ou de retraites anticipées ont eu lieu à cette époque-là à la SNCF.
Mais moi j'avais 43 ans, Nat 26, il nous fallait à tout prix passer par ces nouvelles technologies.
Une formation aurait été la bienvenue - c'était bien le moins - mais pour les "Mendois", rien de prévu :(
On continue dans la gaieté. Mon père m'apprend que sa filleule Annie, 39 ans, - qui fut ma camarade de jeux favorite durant mon enfance - vient de mourir, elle et son mari...
En cette mi-mai 1994, on comprendra que je ne suis pas au meilleur de ma forme...
Les masques vont tomber début juin. Chef adoré nous invite chez lui, afin de faire plus ample connaissance. Avec les conjoints évidemment. Ma seconde collègue - qui je l'ai dit connaissait l'oiseau - a décliné l'invitation, et Nat refuse d'y aller toute seule. On la comprendra aisément.
Ce repas sera carrément surréaliste. La tactique de chef adoré est de nous faire boire, tant et plus, afin qu'il sache ce qu'on a dans le ventre. Mais... en même temps qu'il nous sert, il SE sert !
Nat et moi avons compris la manoeuvre, de sorte que nous ne buvons qu'une gorgée tandis que chef adoré lui, s'enfile le verre entier. Puis s'empresse de nous le remplir.
Chef adoré a bien des défauts, mais il n'est pas alcoolique. Si bien que le résultat qu'il escompte va s'inverser, à savoir que si Nat et moi resterons assez "réservés", lui va s'épancher.
Et son "épanchement" ne sera pas triste... Il commencera par faire de grosses allusions sur Nat et moi, sous-entendant un chantage éventuel auprès de mon épouse. Puis, ayant épuisé le côté "personnel", il va s'attaquer au côté "boulot", où il nous annonce carrément que deux nouveaux ont arriver, qu'il a bien l'intention de refaire entièrement l'antenne de Mende avec eux deux, et que nous, les "archaïques" (sic) devrons nous soumettre ou nous démettre. Et, toujours sous l'emprise de l'alcool, nous conseillera vivement de demander une mutation !
Voilà. En ce mois de juin 94 le décor est planté.
Mais ma Nathalie va se montrer beaucoup plus forte que prévu. Non seulement elle ne baissera pas les bras, mais tiendra la dragée haute à chef adoré.
C''est... mon épouse qui va - involontairement - nous donner un coup de pouce. A savoir qu'elle envisage de partir 4 semaines chez elle en Normandie, son père venant d'avoir un accident. 4 semaines que je n'ai pas posées en congés - c'est prévu pour août - et que par conséquent je devrai passer à Mende...
En clair, un mois entier ensemble, Nat et moi. Et ça, mon épouse le sait parfaitement.
Un mois où l'on a prévu de vivre "ensemble", chez elle, mais aussi éventuellement chez moi, et pendant ce mois de juillet nous pourrons nous tester au quotidien, ce quotidien qui tue bien des couples naissants.
Certes, les beaux sentiments c'est facile quand les questions basiques ne se posent pas, comme la cuisine, la vaisselle, le ménage, les courses, la lessive, le repassage...
Et bien ce challenge-là, Nat et moi on se promet de le tenir pendant ce mois de juillet, à l'issue duquel on verra si le mariage est toujours d'actualité.
Soit ça passe, soit ça casse. Inutile de continuer à faire de beaux projets - le mariage, les beaux bébés - avec tous les boulets que nous traînons, si nous ne sommes finalement qu'un couple occasionnel de "cinq à sept".
Et la machine à broyer va de nouveau frapper un grand coup.
Après avoir assommé Nathalie le 12 mai, c'est à présent sur moi que l'attaque va se porter.
Et pas dans la dentelle.
C'est très exactement le 8 juillet que cela va se produire. Après une semaine en couple que je qualifierai de réussie.
Chef adoré est une fois de plus fin bourré. Et, alors que je parle du travail de la vacataire - avec qui tout le monde a couché sauf moi - qui n'est ni fait ni à faire, il rugit.
"Parce que tu crois que ton travail à toi il est bon ? C'est de la m... ce que tu fais ! Sans parler de ta personnalité, tu n'es au fond qu'un sale hypocrite".
Je ne bronche pas. Partant du principe que se faire insulter par un imbécile est un plaisir de fin gourmet.
Il le voit, et change alors de registre. Tape alors où ca fait mal.
"De toutes façons, Nathalie et toi vous êtes aussi mauvais l'un que l'autre, aussi hypocrites, vous faites bien la paire".
Là, je m'apprête à répliquer, et c'est alors qu'il me saisit par les épaules (1m95, carrure de catcheur) et hurle qu'il en a maaarre de nous deux.
Menace physique, là, je suis dépassé, je suis choqué, et je file dehors en pleurant et en claquant la porte vitrée, qui se brise en mille morceaux.
Et je le vois alors sortir en beuglant :
"Tu me la rembourseras cette porte, je te le promets... Allez, va chialer, petit con"...
Puis je croise Nat qui me voit dans cet état, me demande pourquoi, et je ne pourrai que montrer le bureau du doigt.
"Ne t'inquiète pas, j'y vais" me dit-elle en m'embrassant sur la joue.
Elle aussi se fera traiter de tous les noms, d'une façon incroyable. Elle aussi ressortira du bureau en pleurant, ce qui fera sa joie. Car je l'apprendrai dans les mois qui suivront, son pied, à ce monsieur, c'est de voir Nat pleurer...
Le soir, nous irons pique-niquer à 20 km, pour nous changer les idées, et en quelque sorte faire le point.
Le point sur notre situation, sur notre pauvre couple qui s'aime éperdument et qui est menacé de tous côtés...
Mais durant les trois semaines qui vont suivre, nous allons bien gérer le quotidien, chacun se répartissant les rôles (vaisselle, aspirateur, lessive, commissions) malgré les bombes qui de tous les côtés viennent s'écraser sur nous.
En cette fin juillet 1994, nous pensons alors qu'hors catastrophe, nous sommes capables de vivre ensemble, et pas seulement un "cinq à sept".
Hors catastrophe certes mais aussi - nous le saurons plus tard - pas dans la clandestinité...
Je vous embrasse
14:41 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : harcèlement
Commentaires
Hors catastrophe, quelle jolie expression, ce qui signifie d'après mon interprètation : Un amour qui survivra à toute les épreuves de la vie, à la séparation, aux "coups de gueules" aux déchirures, aux aléas de la vie, à l'impossibilité d'aimer quelqu'un d'autre, au temps qui passe et bien au delà.......tant de souffrances aussi, plus fortes que dans une relation : Non-fusionelle...
C'est un drôle d'amour. Nat et toi vous vous aimez, c'est toute la différence. Même séparé cet amour te donne une énergie, et un rayonnement magnifique, je me trompe ?
Comme tu me disais dans une autre note, la mienne a finalement été bien plus négative, plus douloureuse, car j'ai eu droit à des "je ne t'aime pas" "oublie moi". Faut être mazo pour aimer des années quelqu'un qui ne t'aime pas, à force de lire ton blog, je m'y reconnais à 600%.
J'avais lu un jour qu'il existe des rencontres d'âmes, et qu'il arrive quelques fois que l'un des 2 ne reconnait pas l'autre car pas "aware" comme dirait JC Vandamme :-) Moi je me dis qu'en fait c'est tout simplement que j'attirais ce en quoi je croyais à ce moment là : "je ne crois plus en l'amour"...
Écrit par : Christel | 08/10/2010
Je m'attarde sur ta dernière phrase. J'ignore si tu as lu mon blog depuis le début, mais arrivé la quarantaine je n'y croyais plus non plus. Enfin, je pensais que je n'y croyais plus.
Et boum !
Tout ça pour te dire que si tu n'as pas connu d'amour semblable au nôtre, amour qui pour l'un comme pour l'autre sera obligatoirement le dernier, et bien, tout peut arriver !
Sinon, sur le reste, tu as raison. Oui, cet amour-là me donne une force, déjà celle de m'être sorti du trou où j'avais été plongé. Et puis, pour moi, quelle que soit la manière, il me semble impossible que le mot "fin" soit inscrit sur cette histoire.
Je suis persuadé - et c'est Nat elle-même qui me l'a dit - que je suis son âme-soeur. Et j'ai bien peur que mettre des centaines et des centaines de km entre elle et moi ne changera rien.
Je t'embrasse.
Écrit par : Cica pour Christel | 08/10/2010
♥♥♥ ta dernière phrase mérite des coeurs ♥♥♥ comme les jumeaux donc ...
Ah oui ça...ça ne change rien, le fameux proverbe qui dit "loin des yeux loin du coeur" je n'y crois pas, je pense comme toi et reste persuadée, que RIEN ne sert à RIEN, cette personne est entrée dans ton coeur un jour, et pour avoir tout essayé pour l'oublier tu sais qu'elle n'en ressortira plus.
Que ça se soit mal fini ou bien, que tu es vécu des choses positives ou négatives avec - son empreinte a marqué toute les cellules de ton corps, moi ça me fait penser à un truc assez dingue, t'as l'impression que cette personne vit en toi, tellement c'est hallucinant.
Cica, très belle journée à toi, il va faire beau :-) Bises.
Écrit par : Christel | 09/10/2010
Merci Cica pour le cadeau en chanson, oui R.C. j'adore ♥ :-) bien vu :-)
En effet, je pense qu'elle ne t'a pas remplacé et certainement qu'elle pense à toi très souvent...mais pourquoi ne peux tu pas vivre avec elle, puisque vous vous aimez ?
J'éspère que je ne brûle pas les étapes de la publications de tes notes, à poser ce genre de questions...lol ♥
Écrit par : Christel | 09/10/2010
Si, si, tu brûles...
Car tu verras comment un acharnement réussit à démolir une personne de telle sorte qu'elle n'ait plus confiance en quoi que ce soit.
Bises
Écrit par : Cica pour Christel | 09/10/2010
Nan ! le cadeau n'était pas la chanson, mais la phrase que j'avais écrit sur le stage de la semaine dernière.
Que j'enlève donc puisque tu l'as lue, afin de ménager le suspense...
Bises
Écrit par : Cica pour Christel - 2 | 09/10/2010
daccord :-)
Écrit par : Christel | 09/10/2010
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