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23/01/2019

St Avaugourd des Landes, clin d'oeil du destin

Tout le monde se souvient de son premier amour, de son premier baiser. L'actrice Charlotte Valendrey a patienté quatre années avant que l'heureux élu daigne enfin le lui donner !!

Moi ce fut plus rapide ! Mais plus tardif. J'avais 19 ans.

Mes parents avaient décidé cet été-là de passer le mois d'Août dans le Haut-Doubs.

Je ne connaissais personne dans le Haut-Doubs, et j'étais prêt à parier à 100 contre un que j'allais m'ennuyer ferme dans ce coin de France, pourtant très joli, à un jet de pierre de la Suisse.

Je ne m'étais pas trompé, malgré le solex (d'occasion) que mon père m'avait payé pour mon bac, malgré la Suisse toute proche, les deux premières semaines furent pour moi très très mornes. Pour la première fois de ma vie, je n'attendais qu'une chose, le retour à Paris, la rentrée universitaire où j'allais côtoyer un monde nouveau - et mixte surtout ! - après les grises années lycéennes Louis-Le-Grandesques.

Le 16 août ce fut la fête au village, et j'y fis la connaissance d'une jeune fille, Brigitte. Elle était un peu plus jeune que moi, et on se plut tout de suite.

Ce fut sur la chanson "Gloria" que l'un et l'autre échangeâmes notre premier baiser... Sensation si étrange sur le moment qui vous laisse ensuite avec une envie irrésistible de recommencer !

Aux 15 premiers jours de mortel ennui succèdèrent alors 15 jours de rêve. Mais arriva ce foutu mois de septembre, celui qui brise les unions, et comme tant d'autres nous dûmes nous séparer, se promettant  - comme tout le monde - de nous revoir le plus tôt possible. Un mois après, très exactement, quand elle reviendrait de son mois de vacances avec ses parents, en Vendée département qu'elle préférait nettement à son pays de neige.

J'ai déjà raconté ici les exploits que j'avais déployé pour parvenir à mes fins, tandis qu'on s'envoyait de lettres d'amour dignes de la collection Harlequin.

Et le 8 octobre je revenais dans le village.

Mais elle n'était pas là. Ses parents l'avaient mise en pension, voyant d'un très mauvais oeil cette relation avec un "parisien"... Grâce à la fille de mes hôteliers, je parvins à la voir... quelques minutes à travers une grille de son lycée. Elle pleurait, moi aussi.

Néanmoins je n'abandonnai pas. C'est De Gaulle qui vint à mon secours !
Plus exactement sa mort, ce qui occasionna un jour de deuil national. Si bien que j'avais un week-end de trois jours.  Ce qu'il fallait à mes voisins horticulteurs pour aller chercher des chardons. Et où ça donc ?  Oui, dans le Haut-Doubs.

Je sautai sur l'occasion pour leur demander s'il y aurait une place pour moi, la réponse fut oui, à condition que ça ne me dérange pas d'être serré et de voyager à bord d'une voiture d'avant-guerre !
Bien entendu je n'avais pas prévenu Brigitte. Je voulais lui faire la surprise. D'autant, m'avait-elle dit, qu'elle serait parée de ses plus beaux atours car elle était de mariage ce dimanche 15 novembre.
 
Le jour J, alors que les cloches sonnaient (je frémis depuis en écoutant la chanson de Claude François) d'un pas hésitant je me dirigeai vers le cortège, dans lequel je vis ma Brigitte avec une belle robe et des fleurs dans les cheveux. Elle manqua de défaillir quand elle me vit, et me fit signe qu'on se verrait après.
 
 
 
Les minutes étaient longues, et quand enfin le cortège fut terminé, c'est non pas Brigitte que je vis, mais sa soeur.
Qui me dit "va-t'en, ma soeur ne veut pas te voir".
 
Le coeur arraché, je m'en allai vers ma pension où les amisq qui m'avaient logé faisaient ce qu'ils pouvaient pour me consoler. J'avais réussi à capter la BBC et écouter le hit anglais. Je m'en souviens encore, la numéro un était Freda Payne avec Band of gold !

Le lendemain, départ pour Paris, et durant le trajet, je n'avais qu'une obsession : qu'une voiture venant d'en face nous percute...
A Noël je lui envoyai une lettre, et par retour du courrier elle confirma qu'elle ne voulait plus me voir, en disant : "je ne veux pas m'engager si jeune."

Je mis très longtemps à "cicatriser", je ne sais même pas si voilà seulement 6 ans j'étais "guéri". Une note écrite en octobre 2012 en atteste.

Le temps passa, chacun fit sa vie. Elle se maria, moi aussi. Et, pendant 30 ans, j'éviterai soigneusement ce petit village.
Ca me faisait mal. Les rares fois que j'avais à le traverser (il est situé sur une route internationale) c'était une véritable épreuve. S'ils avaient mis un radar, j'aurais eu mon permis de retiré depuis longtemps....

En 2002 j'étais très mal. Très très mal, et je sentais au fond de moi que j'avais atteint la fin de "mon voyage". Et je décidai alors de passer 8 jours là-bas. Juste avant de tirer ma révérence.
Mon ex et ma fille étaient contentes que j'accepte enfin de faire ce deuil. Sans trop savoir pourquoi. Pendant cette semaine, malgré un soleil radieux, je n'étais pas très bien, j'avais une drôle de sensation... Toujours cette satanée hyperintuition !

Et le dernier jour, le vendredi, sur l'insistance de "mes nanas" (qui certainement voulaient en finir avec cette histoire), je me décidai quand même à me rendre chez elle.
J'y trouvai alors une dame, qui me déclara être sa belle-soeur. A l'évocation de Brigitte, je vis son visage se fermer.

"Vous la connaissez" ?

Je répondis que j'avais été son premier amour.
Et là je vis son visage presque s'illuminer l'espace d'un instant puis elle m'avoua alors que Brigitte avait depuis longtemps quitté le village.

Qu'elle avait habité la Vendée, à quelques deux heures de voiture de chez moi à l'époque.

Et elle m'apprit aussi... qu'elle était morte du cancer deux ans auparavant.

 

En 2003, après une TS ratée, j'y passerai plein de fois, dans le petit cimetière de Saint Avaugourd des Landes, pour fleurir celle qui fut mon premier véritable amour. J'y ai déposé une plaque :"à mon amie". Cela par rapport à son mari et ses enfants, dont j'apprendrai plus tard qu'elle leur parlait de temps en temps de moi...

 

 



Mais l'histoire ne s'arrête pas là !

En 2012, après 5 années d'euphorie (2005/2009), j'étais de nouveau assez mal.
Les notes que j'écrivais sur mon blog à cette époque peuvent en attester.  Fort logiquement, avec une épouse que la maladie avait rendue machiavélique et une famille - à l'autre bout de la France - qui se souciait de moi comme une guigne, j'attendais - cette fois paisiblement - "que ça sonne".

C'est d'Internet que me viendra le salut. Au départ une adversaire - coriace - dans un quizz musical, cette femme de Bastia deviendra ma confidente, puis "un peu plus" au bout de quelques mois.
Problème : elle aussi était mariée ! Et la Corse n'est pas près du Doubs..
Et là encore, je ferai des pieds et des mains pour faire sa "véritable" connaissance (avril 2013), alors qu'elle et moi continuions d'être brimés, niés, massacrés par nos conjoints respectifs. Pour tenir elle s'était mise en mode grand-mère, et moi en mode hit-parades / généalogie.
Nous avions prévu de ne rien bousculer, et de se voir en catimini dans son Ile 5 jours tous les 6 mois (vacances de Pâques et de la Toussaint). Nous ne voulions pas faire de casse..
Mais son mari, qui l'espionnait autant que mon ex le faisait pour moi, découvrit la chose, et à partir de là, pendant trois semaines, la séquestra, la menaça, l'isola, l'obligeant même à se réfugier chez sa maman âgée de 92 ans.

Elle devait fuir. Mais où  ?
Moi je devais prendre mes responsabilités.
Et le 8 novembre au matin, j'annonçai à mon ex que je quittais la maison. Je lui laissais tout, carnet de chèques, voiture, meubles, et même mes diverses collections de disques et de revues qui me suivaient depuis pas mal de décennies. Après tout, vu le nombre de fois elle m'avait demandé "de foutre le camp une bonne fois pour toutes", elle-même ayant déjà quitté le domicile conjugal quinze mois auparavant, je pensais - naïvement - que cela serait mieux pour tous les deux.

L'histoire nous montrera que non, ma chérie sera privée de deux de ses trois petites-filles, et moi de mes deux petits-enfants (dont je ne suis d'ailleurs pas censé connaître l'existence) et aussi, surtout, de ma fille unique qui ne m'adressera plus la parole pour avoir osé avoir fait ce qu'elle, avait fait 8 ans auparavant.

Mais c'était le prix à payer, on ne regrette rien.

On s'installera à Toulon en 2013, à Sanary en 2014, et après un divorce difficile de quatre années (quand j'ai vu les monstruosités déversées sur mon compte en 2016/2017 j'ai été atterré - mon Parkinson partira d'ailleurs de là) on se mariera en 2018.

Quel rapport avec le début de ma note me direz-vous ?

Je me suis penché sur sa généalogie. Mère Corse, je suis à peine arrivé à 1860 de ce côté-là.
Mais père "continental" ! Né à Moutiers les Mauxfaits (Vendée).

Moutiers les Mauxfaits. Moutiers les Mauxfaits... Ce nom me disait quelque chose, mais quoi ?

C'est en remontant les générations que j'ai compris. Le berceau de sa famille paternelle est....

SAINT AVAUGOURD DES LANDES !

Beaucoup d'aîeux de mon épouse sont enterrés dans le petit cimetière.

A quelques mètres de la tombe de Brigitte, mon premier amour.

 

182_view.jpg

La boucle est bouclée. Saint Avaugourd des Landes fait la liaison entre mon premier et dernier amour...


Je vous embrasse.

 

Commentaires

Patrick , cela se lit comme un roman , belle histoire mais un peu triste . amicalement . Jean

Écrit par : jean | 23/01/2019

Triste non, car quelle probabilité y avait-il pour que Brigitte et les ancêtres de ma femme soient enterrés dans ce petit village de même pas 1000 habitants ? Au départ il y avait le Haut-Doubs pour l'une, la Corse pour l'autre. Et ce sera la Vendée qui les réunira !!!
Moi j'y vois un signe, qui me dit que cette fois, je ne me suis pas trompé.
Amitiés

Écrit par : Cica pour Jean | 24/01/2019

Belle histoire, fort bien écrite de surcroît. On peut en conclure que le monde est petit. Saint Avaugourd me parle car ce n'est pas très loin de la Mothe Achard où ma mère a vécu pendant une bonne quarantaine d'année.
C'est une bonne idée de mettre en ligne des récits de ce type (hors musique). J'aime bien te lire même si je ne commente pas souvent.
Amitiés Marc

Écrit par : Marc | 24/01/2019

Bonjour! C'est très beau,Patrick,et magnifiquement raconté. Les mots justes,l'absence de littérature,une grande tendresse pour la vie malgré les écueils. Jusqu'à cette surprenante découverte! Un grand plaisir de lire ces lignes,émouvantes d'un amour à l'autre. Cordialement. Cédric

Écrit par : Cédric | 25/01/2019

Merci à vous deux. Je sais que ce genre de note n'est pas très commentée, mais ça me change un peu du tableur Excel ! Non pas que ça me gave de faire ces compilations mensuelles de tops 50, car je comptais m'y mettre. Et la publier m'évite de reporter à plus tard !
Mais là je me fais plaisir, je reviens aux origines de mon blog et je m'étonne que ce genre de note où je m'épanche ne soit pas commentée par ceux qui, justement, s'épanchent le plus ici...

J'ai dû amputer ce blog de notes qui parlaient de "mon autre vie" voilà un quart de siècle, n'ayant plus de raison de les garder dans ma nouvelle vie. Et j'avais même envisagé de supprimer toutes les notes ne parlant pas de chansons, en rebaptisant le blog.

Mais j'ai finalement réalisé que ce journal "extime" écrit au jour le jour entre 2010 (début du blog) et fin 2013 (ma "fuite") peut se révéler une réponse pour ceux qui se sont demandé, se demandent, ou se demanderont (peut-être d'ici une dizaine ou une douzaine d'années) la raison de ce geste. Pour ma part, quand récemment j'ai relu ces notes, je suis resté pantois !

Peut-être pas de top50 1986 après-demain, mais je tâcherai de ne pas trop faire traîner !
Amitiés.

Écrit par : Cica pour Marc et Cédric | 25/01/2019

Le monde est vraiment petit!

Écrit par : Carla | 28/01/2019

Une très belle histoire. Je te lisais du temps où tu appelais ton épouse "ma chère et dure". Je suis vraiment contente pour toi que tu aies retrouvé un peu de bonheur.

Des bises,

Écrit par : Stef | 29/01/2019

Patrick,
Je ne sais pas quoi écrire, quelle leçon de vie, de courage, de malheurs, de circonstances qui font la vie d'un homme, la tienne en l'occurence.
Je te souhaite ici, pour commencer, de bons moments dans l'avenir.
Claude

Écrit par : Claude | 02/02/2019

Tu es une de celles qui suivaient direct live ma VDM du début des années 2010. A l'époque si on m'avait prédit mon avenir, je ne l'aurai pas cru. Mais j'aurai quand même signé, même avec mon tiercé Tension Diabète Parkinson, j'aime et je suis (enfin) aimé, c'est je pense le principal. Et même si je sais qu'il me reste au maximum 5 à 6 années à vivre "normalement", je compte en profiter au maximum.
Des bises

Écrit par : Cica pour Stef | 02/02/2019

Merci de ton com, toi mon copain de régiment. Ce qui m'a toujours sauvé, c'est que j'ai toujours cru en ma bonne étoile, en sachant interpréter les "signes" que je rencontrais. Une fois seulement j'ai désespéré, mais "là-haut" on n'a pas voulu de moi !
Comme je l'ai dit à Stef, je sais que le temps m'est désormais compté (avant la dégradation) mais je pense qu'avec un bon moral je peux prolonger ce que les toubibs appellent "la lune de miel' (période où la maladie est stabilisée par les médocs) et faire mentir les statistiques.
Et en premier, savoir apprécier les bons moments que m'apporte ma petite femme. Et oublier le reste même s'il n'est pas négligeable : Un cousin Breton que je considère comme mon frère appelle ça "lâcher prise".
C'est je pense un bon conseil.
Ma petite femme et moi faisons des tas de projets, et pas des moindres.
Encore merci Claude.

Écrit par : Cica pour Claude | 02/02/2019

Lorsque j'ai été diagnostiqué en 2007 pour un Lymphome Non Hodgkinien dit des "cellules du manteau", la médiane de survie lue sur internet était de 30 mois, 11 ans après je suis encore là, et avec 2 crabes de plus. Je bricole fais de la moto, des projets mais pas dans la panique de voir la fin s'approcher. J'ai vu partir mon père, mon frère ainé que j'ai dépassé en âge tous les deux, des amis aussi, parfois vraiment trop tôt.
Alors il faut continuer comme on a toujours vécu sans penser de trop, je laisserai du positif à mes proches, à tout point de vue, alors je partirai serein.
C'est cet état d'esprit qui m'a boosté lors des traitements durs de 2007 pour finir les terrasses, béton et carrelage, ne pas laisser comme souvenir un chantier :-)
Quand c'est le moment, il faut savoir être fataliste, mon frère Christian, sur son lit médicalisé des derniers moments de lucidité a dit "j'ai eu une belle vie" !
Bon courage à toi mon pote de régiment et à tous.
Claude

Écrit par : Claude | 03/02/2019

Très belle histoire romantique et très bien écrite, et qui prouve que souvent le monde est petit. Bravo et bon courage à toi pour ton combat contre la tension, le diabète et Parkinson ! Tu vois, tu as connu des difficultés amoureuses et maintenant tu as une femme qui t'aime, il ne faut jamais désespérer !

Écrit par : Hug | 12/02/2019

Merci Hug :)
Je n'ai désespéré qu'une fois, voilà 16 ans, et j'ai eu tort ! Si on y croit, et si on a de la volonté,on "rebondit" toujours.
Amitiés
Patrick

Écrit par : Cica pour Hug | 12/02/2019

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