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08/12/2010

Post - TS (mars à mai 2003)

Me voici rentré chez moi. Pour deux jours car après-demain direction la Bretagne voir notre fille. J'ai retrouvé Ouhans je dirai presque... sous la chaleur ! Il faisait encore 13 degrés hier soir, et en ce moment c'est pareil... Mais qu'est-ce qu'il pleut !! On a même eu droit hier soir à un bel orage, avec des éclairs dignes d'un été....

 

Sinon pour les nombreuses (très exactement 92) personnes qui ont lu ma note "l'espérance folle", il n'y a pas trop eu de suspense, puisque je suis là, encore là, à écrire.

J'aurai des réactions différentes après ma TS.

La plus fréquente sera celle du boulot, et de certains membres de ma famille : tout cela est bidon !

Celle du docteur qui à l'opposé me donnera deux mois d'arrêt ensuite : je suis un miraculé. Quand il m'a vu le 24 au matin, avec des pulsations à 220, il a fortement pensé que au minimum j'aurais de graves séquelles, et au maximum je n'y survivrais pas. Ce qui m'a sauvé, d'après lui ? La dernière "rasade" de comprimés.
A 25, j'y passais. 35 en revanche, c'était trop ! Va comprendre la médecine...

Enfin la réaction de ceux qui tiennent à moi : la culpabilité. A fond. Ma fille écrira même une lettre très dure à Nathalie. Malgré que je lui aie dit qu'elle n'était pas la principale responsable. Que n'a t-elle pas écrit à mes chers supérieurs ??? En tout cas, avec cette lettre, il était désormais inutile d'espérer quoi que ce soit.

Un conseil à ceux qui font une TS tout en sachant qu'ils ne passeront pas l'arme à gauche, ceux qui tentent un appel au-secours sans trop de risques: surtout abstenez-vous !!!  Car en plus du fardeau qui est le "facteur déclenchant", va alors s'ajouter un double fardeau : celui de ceux qui vous en voudront à mort de ne pas avoir pensé à eux, et celui qui crieront au bidonnage...
A l'enfer d'"avant" succèdera alors l'enfer au carré !

Pour moi, c'était donc net, j'avais fait une connerie en prenant ces comprimés, et il me fallait quelque chose de plus décisif...

Qui, cette fois ne pardonnerait pas.
tgv.jpg(Photo prise par bibi...)
 

Il m'avait enlevé ma raison de vivre, qu'il finisse son travail, ce maudit cheval de fer, en m'enlevant la vie.

Je vais passer des semaines et des semaines de préparation, guettant l'endroit qui serait le plus propice.

Mais, en attendant, "la vie continue", et je reçois - chez moi - un coup de fil de la DRH qui me dit que si je voulais, en guise de "compensation" du poste qu'on m'avait volé, une place était libre à Biarritz. Sans passer comme à Millau par la case "cas social". J'avais assez d'ancienneté pour pouvoir y prétendre.

Ma foi je me dis pourquoi pas, pensant au fond de moi que je n'aurai guère le temps de goûter à cette nouvelle affectation ! Surtout que ma fille me dit d'emblée "pas question que je quitte la Bretagne"...

Entre-temps je passe voir mes cousins, les parents de mon filleul. Et ma cousine Emmanuelle me cuisine jusqu'à que je lui dise pourquoi cette TS. Et dans la foulée, je lui montre la lettre de Nat par laquelle tout est parti. Cette cousine est très "nature", si elle est parfois sans-gêne, elle ira toujours droit au but.
Et quand elle me tend la lettre après l'avoir lue, elle me dit :
"Cette lettre est une lettre d'amour, elle t'aime toujours..."


Je me dois cependant de citer quelqu'un qui me fera un temps hésiter dans mes funestes projets.

Une jeune Mexicaine, reçue chez nous dans le cadre d'un échange international. L'année suivante, c'est notre fille qui doit (devait, si on va à Biarritz) aller chez elle.

Cette jeune fille, à qui je ferai visiter plein de coins autour de chez moi, avec qui j'essaierai un dialogue pas très facile (car elle ne parlait pas un mot d'anglais et un poquito le français) dira à la fin de son séjour à ma fille : tu as de la chance d'avoir un papa comme ça.

Car c'est surtout pour cela que je voulais me supprimer. J'avais une vraiment piètre opinion de moi-même, la personne que j'étais non seulement souffrait mais je la détestais. En fait, je voulais autant tuer cette personne-là, bien dépeinte par Michel Sardou en 1981, ce Mauvais homme, Mauvais mari, mauvais amant Qui tient debout, évidemment, Entre l'alcool et les calmants que d'arrêter de souffrir.
Et Nuria, cette jeune Mexicaine, qui n'avait aucun a-priori sur moi avant d'arriver en France, qui ne connaissait absolument pas ma vie, avait jugé que j'étais quelqu'un de bien...

Et du coup, je vais faire une folie. Tenter une dernière fois ma chance après de Nathalie. Mon ordinateur, celui que j'avais payé à ma fille en 2001, possédait un graveur de CD. Alors je vais faire des aller-retour entre chez moi et la médiathèque de Vannes pour faire des copies. Le but étant de créer pour Nathalie un CD avec des chansons qui reflètent ce que je pense. 
Mais je ne l'enverrai pas ! Non, j'irai carrément... le mettre dans sa boite aux lettres ! Et pour cela, je n'hésiterai pas à faire, dans la journée, entre l'embauche de mon épouse et sa "débauche" un aller-retour vers chez elle. Personne ne saura que j'ai été dans les Yvelines !
Chez elle où je suis vers les 13h, où je dépose mon CD et repars. Juste pour lui montrer ce que je suis capable de faire pour elle...

Mais tombent les résultats des mutations, le 20 mai.


Je quitte Vannes !!! Et j'apprends que je suis muté à Biarritz.

Tandis que Nathalie, elle, arrive en Bretagne...

Maudit, je suis maudit, notre couple est maudit !!!!!
Et je vais de nouveau me tourner vers les passages à niveau.  Je ne sais pas quand je me jetterai sous le TGV, mais ce que je sais, c'est que ce jour-là viendra.

Je n'en peux plus, je ne veux plus de cette vie injuste où je souffre et fais souffrir les autres, et sauf miracle, je ne verrai jamais Biarritz.

 

Mais ce miracle, il va se produire.
Non, Nathalie ne reviendra pas, c'est encore plus "merveilleux" que ça.

La suite demain.

Je vous embrasse.

 

 

 

 

 

15:20 Publié dans détresse, moi, psy, Ras-le bol | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : suicide

04/12/2010

l'espérance folle (15 au 23 février 2003)

Le 15 février, je reçois une lettre chez moi. L'écriture ne trompe pas...

C'est ELLE.

 

Cher Patrick,

Je t’écris ce petit mot pour te dire que ne souhaite pas te revoir. Il y a 6 ans quand nous nous sommes séparés à Mende, tu m’as brisé le coeur. Tu avais alors fait le choix d’aller vivre en Bretagne avec ta famille et tu en avais le droit. Aujourd’hui rien ne sera plus jamais comme avant. Pour moi notre histoire fait partie du passé et je désire tourner cette page triste de ma vie. Je te demande de ne plus me contacter car ce que je souhaite avant tout, c’est t’oublier.

J’espère que les années à venir vous apporteront beaucoup de bonheur à tous les trois.

Nathalie.

Je suis sonné sur le coup, d'autant que ce n'est pas la première fois que je reçois des lettres (ou mails ou coups de fil) de ce genre.
Non, Nat n'est pas un être parfait. Elle est versatile et surtout très influençable. Et je me doute qu'une fois de plus "maman" est derrière tout ça.

Mon épouse veut savoir quelle est cette lettre qui me met dans un tel état. Je la lui tend (elle était adressée chez moi, c'était donc pour que "tout le monde" la lise), et sa réaction sera de dire :
"elle est vache quand même"... ! (sic)

Et puis il faut savoir extraire le positif de toutes choses. Certes si la première partie de la lettre est de très mauvaise foi (il y a 6 ans j'avais fait le choix d'aller en Bretagne... Mais c'était elle, qui sous la pression de tortionnaire, avait la première posé sa mutation !) mais lorsqu'elle écrit "ce que je souhaite surtout, c'est t'oublier", ça veut quand même dire qu'elle ne m'avait pas oublié....

Je réussis quand même à l'avoir au téléphone, pour lui dire que si vraiment elle le souhaite, elle peut couper les ponts, mais que ce n'est ni par mail, ni par lettre, ni par téléphone que cela doit se faire.
Je pense alors à la chanson de Lara Fabian , "tout" :

Parles, parles, dis-le moi sans trembler  Que t'en a plus rien à cirer  Parles, pleures et je comprendrai

Elle est surprise, et est d'accord pour que passe la voir en revenant de Besançon, où je dois aller chercher un appart'. Elle appellera ma fille pour fixer l'heure et le lieu.

Rien n'est perdu !


Mercredi 18. On couche à Auxerre chez une cousine de mon épouse. Et là se vérifie ce phénomène qui veut - pour moi - que l’éloignement, la distance, me fait souvent oublier un moment l’essentiel de mes ennuis. Vérifié maintes fois, et là encore.
Coup de fil de ma fille, je saute sur le téléphone, plein d'espoir.
Nat n'a pas appelé.

Le lendemain 19 direction Besançon. On quitte la grisaille de l'ouest et on se dirige vers le ciel bleu. Il ne nous quittera pas ! On pose nos bagages à l’hôtel et on prend une carte de bus journalière. Pour 3 euros, on peut faire ce qu’on veut (d’après la Vie du rail c’est la ville où les transports en commun sont les moins chers). Un arrêt se trouve juste à côté de l’hôtel, on commence par voir où se situe mon prochain lieu de travail.
Puis bus vers la ville où on épluche les agences immobilières. Pas donnés les logements, mais quand même relativement abordables, par rapport à Vannes.

Une idée me vient. Si on allait à Pontarlier ? Voir combien de temps il faut, sans se presser, pour rejoindre notre lieu de vacances des deux derniers étés ? Au passage on achètera de la liqueur de sapin à la distillerie, et pourquoi pas, on mangera une fondue dans notre resto préféré ?

Je m'aperçois alors qu’à à peine 20 km de Besançon le paysage change complètement. On arrive dans les « alpages », avec des petits villages dont les maisons comtoises s’enserrent autour de l’église. Tout ça sous un épais manteau de neige, c’est magique. On est complètement dépaysés.

On arrive à temps à la distillerie, où j’ai un mal fou à marcher dans les rues verglacées avec mes bottines de ville ! On nous offre l’apéro. Chance aussi le resto « fondue » est ouvert.
Tout ça avec un bon vin d’Arbois en pichet, la vie serait presque belle. Mais il faut vite replonger dans la réalité, Ma fille appelle.

Toujours pas de Nathalie.


Vendredi 20, Direction la Suisse. Départ dès 11h, même route au début que sur Pontarlier. La neige au soleil, que c’est beau... On mange à Valdahon, dans une petite pizzéria qui ne paye de pas de mine mais où les spaghetti sont parfaits. Puis Morteau, dont on découvre la vallée enneigée dans la descente. Mon épouse en a le souffle coupé. Et la Suisse, proche finalement (70 km) que l’on atteint au Locle.
Quelques kilomètres encore, par  la route touristique.
Là encore la transition est prodigieuse. D’une vallée industrielle, en quelques kilomètres on arrive à un col qui porte bien son nom,  « la vue des Alpes ». A 1283 m d’altitude (il fait doux, dans les 6/7 degrés) la vue porte sur pas moins de 4 pays. De la Sivretta (Autriche) à 250 km sur l’extrême gauche - bizarre pour l’Autriche - au Mont Blanc à 130 km en passant par les grands sommets helvètes, comme le Cervin. J’ai dit 4 pays, car on distingue également le Mont Rose en Italie, droit devant, qui ne passe pas inaperçu avec ses 4634 mètres.

Mon épouse est KO devant tant de beauté. On remonte en voiture et dix minutes après on est  à Neuchâtel...
Puis retour vers Pontarlier et Besançon.

J’appelle alors ma fille, qui n'a toujours pas reçu de coup de fil des Yvelines.

Là j’avoue je prends un coup de massue. Il me reste une dernière chance, c’est lundi matin, après le week-end.

Il fait froid quand nous redescendons. -4 à Pontarlier mais mon thermo par endroits descend vers les -11°... Besançon - 2°. Là on se balade dans la ville by night. Cette ville est également belle la nuit, éclairée comme il le faut. Momo regarde, ébahie, les maisons.

 

 

Départ le lendemain 21 après-midi. Direction Dijon puis Vézelay. Auxerre le soir. Longue balade dans cette superbe ville où j'ai bossé en 1974. Pendant laquelle notre fille nous appelle. Pas de nouvelles des Yvelines .
A la télé, à l’hôtel on parle d’un tremblement de terre. Rien ressenti !

Grand jour est le lendemain 22, direction le 78. Je ne vais pas vite, on dirait que j’appréhende, que je sais déjà ce qui va m’arriver. On pique-nique vers Nemours, sur une aire de l’A6 déjà saturée. On atteint l’hôtel à 15h30, et je me mets vite en quête d’aller voir où habite ma bien-aimée. Dans quel cadre elle vit. Muni d’un plan je n’ai pas de mal à trouver sa rue.

Ma fille m’a dit qu’elle habitait au deuxième, je regarde. Pas de R5, elle n’est pas là. Mais de toutes façons je n’y serais pas allé. Je lui ai promis de ne pas forcer sa porte...

Puis on décide d’aller à Paris. J’ai un bon plan pour ça. Se garer dans Versailles et prendre une carte journalière « 4 zones » à 55 francs. Ainsi on pourra d’une part se balader à notre guise et de l’autre choisir nos arrivées. Car je ne veux pas arriver à Montparnasse. C’est là qu’on s’est séparés, je ne veux pas revoir cet endroit pour le moment.
On arrive donc par St Lazare et avec mon épouse on fait la visite-express habituelle. Qui comprend quand même la butte Montmartre, la Madeleine, la Place Vendôme, le Louvre, le Pont-Neuf, les quais de la Seine et la Tour Eiffel. Mon épouse est une fois de plus subjuguée.

Mais pas moi.
C’est la première fois que ça me fait ça.

Paris me paraît fade ! Alors qu’il fait une température idéale, sans un souffle de vent, qu’il n’y a pour une fois pas trop de monde (les ricains nous boudent car on critique leur guerre à la con), je ne suis pas aussi bien que les autres fois. Je saisis à présent l’expression de Gilbert Bécaud dans Et Maintenant:

Même Paris crève d’ennui Toutes ces rues me tuent.

Nat me manque. Ce n’est pas l’appréhension du lendemain mais je reste sur l’impression de la Toussaint où j’avais eu l’impression de rêver en parcourant les rues de Paris avec elle. Là je ne vois que Mon épouse à mes côtés.

A 23h30 on est à Versailles, à minuit on est à l'hôtel .

Lundi 23 au matin. Coup de fil de ma fille. Nat est au boulot. Elle avait pris sa semaine. Elle va nous appeler « dans l’après-midi ».

Merci Seigneur. Mais c’est loin et vaste «l’après-midi». Alors on va tuer le temps. On commence par aller devant chez elle. Tremblant comme une feuille, je pénètre dans son entrée. Je vois son nom. Je vois sa fenêtre...

Midi, on décide de casser la graine à Leclerc, juste à côté de mon école supérieure où j'ai traîné mes guêtres de 71 à 72, il s'appelait alors "super M". De quoi me bouleverser...

Non. Ce que je regarde avant toute chose, ce vers quoi mes yeux sont désespérément tournés, c’est le portable de mon épouse. Qui reste inexorablement silencieux.

L’après-midi on va vers les étangs de la Bièvre. Je suis de plus en plus excité, j’attends fébrilement. Je commence à conduire nerveusement. 15h30. Direction le parc du château de Versailles. On y entre par une porte donnant sur la nationale, à 2 bornes du château. Mais Mon épouse au bout de 500m dit «qu’elle en a marre». J’ai l’idée alors d’aller à France-Miniature.
Fermé jusqu’à fin mars.

Je tourne de plus en plus en rond.

16h30, je demande à ma fille de l’appeler. Personne. Elle ne bosse pas cet après-midi-là !

Alors elle doit être chez elle. On s’y rend, on voit la R5. Je me gare dans le secteur, hors de sa vue. Et on attend l’appel. Un moment donné Mon épouse n’y tient plus et va chez elle. Je suis tellement tendu que je ne l’empêche même pas !!! Le temps passe, l’espoir renaît. Mais au bout de 10 minutes elle revient. « Elle ne répond pas ».

Ecoeuré, désespéré, je mets le moteur en marche. Le type devant chez qui nous étions garés commençait du reste à nous regarder d’un air bizarre.

Je décide de rouler mollo au début, au cas où elle appellerait. On quitte sa rue à 17h15, et sur la deux fois deux voies jusqu’à Dreux je ne dépasse pas le 110. Après je réalise que les chances sont de plus en plus minces , et dès que les portions reviennent à 4 voies je vais de plus en plus vite. Dans les villages ou dans les « deux voies » je ne fais pas de folies, mais dès que je peux je bourre. Après Mayenne, je suis à 160 sur la voie rapide, puis sur l’autoroute à fond jusqu’au péage. Mon compteur ne bouge pas du cran « 170 » dans un bruit d’enfer, car - une grande première depuis 27 ans que j’ai mon permis - je n’ai pas mis la radio. Silence total dans la voiture. Puis 150/160 jusqu’à Rennes. Le périph, que je crains tant, je le parcours à 120/130 dans un état presque second. Puis je m’engage vers Vannes. Il fait nuit, et je sens bien qu’à ce rythme je vais finir par avoir un accident. Mon épouse ne dit rien, elle comprend. A l’aire de Paimpont Brocéliande je lui passe le volant.

4 h pile pour les 426 km que marque le compteur. 107 de moyenne sur une nationale, 17 km d’autoroute et des traversées de villes et de villages - sans dépasser ce qui y est autorisé - , pas mal...

Ma fille réagit mal « Pour qui elle se prend celle-là.. Madame DE ! Je vais lui écrire une lettre dont elle se souviendra ».

Ca me fait encore plus mal qu’on parle comme ça de ma Nathalie. Même si elle a été vache cet après-midi, en me laissant espérer un coup de fil.

Et si elle m’avait laissé un mail au boulot ?
Encore une chance...

Boulot. Ordinateur. Réception des messages.

Je suis là, le coeur battant.

Message, oui, mais pas de Nat. Mais un de Jean-Paul : « Game is over ».  Il me raconte en substance que « les collègues » lui auraient dit que je cassais du sucre sur son dos. Et que la belle période d’embellie qui a duré plus d’un an se termine. En clair le harcèlement va reprendre de plus belle... jusqu'à ma mutation pour Besançon.

Second mail, de la DRH qui me dit "désolé pour Besançon mais un emploi réservé est passé devant vous..."

Et là, d'un coup, je deviens très calme.

C'est maintenant. C'est là que mon calvaire va enfin se terminer.. Je vais enfin m'autoriser à me reposer, une chose que je refusais depuis plus de trois ans.

Toujours calme, presque souriant, je sors de mon placard une boîte de Rohypnol.
Je commence par avaler 10 comprimés.
Puis je rentre chez moi, l'air de rien, et vais me coucher, comme si de rien n'était.
Petit passage par la salle de bains, où là je m'enfile une nouvelle dose de 15 pilules magiques.
Puis je me glisse dans mon lit, auprès de mon épouse.

Et là, j'attends, calmement.

Calmement au début,
puis de moins en moins calmement, constatant que "ça ne venait pas".

D'habitude, 2 de ces petits comprimés m'assomment en un rien de temps, mais là, non !
Lutte féroce entre la partie de moi qui veut en finir, et celle qui ne veut pas mourir.

Alors, au bout d'une petite heure, je finis par me lever. Je titube un peu - quand même - et je retourne dans la salle de bains reprendre une nouvelle dose de 10 comprimés, assortis cette fois d'une demie-bouteille d'après-rasage.

Je pense que l'envie de mourir est proportionnelle au fardeau que l'on porte.

Puis, je me rallonge.
Et je plonge.

Rideau.

 

15:30 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : suicide

22/11/2010

les grands aveux (novembre/décembre 2001)

D'abord, de nouveau un grand merci à vous qui me lisez - souvent en silence - près de 120 visiteurs uniques et 400 pages lues pour la seule journée d'hier, c'est pour moi la plus belle des récompenses.

Pour en revenir à mon récit, j’avais oublié  que, pendant mes vacances parisiennes, mon père osera me dire que si je téléphone régulièrement tous les soirs, c’est que je ne pense qu’à son argent, et que je n’attends que le moment où il fermera les yeux pour récupérer le magot !!!!

Outré, je décide alors de ne plus l’appeler, et même mieux, de ne pas aller le voir à Noël.

 

Le 13 novembre, je vais me requinquer à Toulon, chez mon cousin germain Robert (le colonel droit dans ses bottes). Là, au moins, je peux « dégorger », parler de mon tourment.
En même temps je vais faire un pélerinage côté est, à 5km de là, marcher dans les pas d’une petite fille qui a de fortes chances d’être ma sœur…
Je fais des photos à tout va, bien sûr, rien n’a énormément changé depuis 1963, hormis les murailles ornées de digicodes et de caméras qui remplacent les murets ornés de végétaux et les portails en bois. En 1963 c’était le quartier des ouvriers (le must était alors d’habiter le centre) en 2010 c’est le quartier chic, loin justement du centre, de son vacarme et de sa « racaille »….

Je reviens le lundi 19, et au boulot Panique à bord !  le chef arrive à 6h50 pour me « parler ». En fouillant dans mes répertoires, ils ont fini par dégotter la copie de mes « mémoires », que je retranscris au taf par disquette.
Toujours très pragmatique, il m’explique avec moult dessins et croquis qu’il y a plusieurs aspects dans ce que j’ai écrit. Notamment sur les collègues, qui en prennent tous (même lui) plein leur grade. Et surtout Harceleur I. Qu’il a «pour l’instant réussi à calmer » .
Mais une discussion avec ce dernier lui paraît inévitable, vu mes dires.

Mais ce qui le frappe le plus c’est le côté « suicidaire » de ma prose. La Grande Question qui vient à l’esprit : l’ai-je fait exprès ? Là je pense qu’il me prend pour un débile. Car primo je ne tiens pas trop à ce que toute la boîte soit au courant pour Nat, et secondo vu ce que j’écris sur mes collègues c’est le meilleur moyen de me les mettre encore plus à dos, tertio je parle quand même pas mal de ma vie familiale....ma mésentente avec mon père, sa vie à lui, les problèmes avec mon épouse et ma fille etc...

Ce que j’écris n’est destiné qu’à moi, et rien qu’à moi.
Mais cela a été violé, et à présent, tout le monde sait …

Le chef, lui, voit les choses administrativement comme toujours et propose qu’on écrive d’un commun accord (sic) au directeur de région pour dire « que je ne vais pas fort ». Il parle même d’une assistante sociale !

Je me vois bien devant une assistante sociale dire que je suis amoureux d’une autre femme !  Et en plus d’une collègue... N’importe quoi. Mais je dois le dire, au bout d’une heure 20 de discussions avec le boss , j’ai du mal à pousser la porte, celle où m’attendent les collègues, qui savent à présent tout de moi, et ce que je pense d’eux.  En plus il y a une réunion ce jour-là, donc tout le monde est là....

Surprise, ils me font tous bonne figure. Moi je ne sais plus bien sûr où me fourrer pendant la réunion, n’interviens pas ou presque.

Après la réunion Harceleur I vient me voir et me la joue paternaliste. Il me dit qu’il faut qu’on s’explique. Moi qui m’attendais à un cassage de gueule en règle.

Ils ont peur, c’est évident, après avoir lu ce qu’ils ont lu, et le chef va même venir à la maison pour raconter sa découverte, et bien insister sur le fait que s’il arrive quelque chose, il ne sera pas question d’attaquer la boîte.

Très fin, le chef, à présent, si mes deux nanas étaient censées ne rien savoir, à présent elles savent ! Pour mes idées de suicide j’entends, par pour le reste et heureusement…

Donc, grande discussion avec Jean-Paul (harceleur I) au bowling. Je lui raconte alors tout, de A à Z. Et le type - qui se révèlera un vrai coeur de midinette - est ébranlé. Va même me raconter certains épisodes de sa vie intime, dans sa jeunesse. En attendant, il a compris, me laissera tranquille, et fera en  sorte que les collègues fassent pareil.

J’avoue, c’est un poids de moins !

 

Ma fille s’est mise en couple. Un truc sérieux, un copain de classe, et elle vient nous le présenter. Pour être sérieux ça le sera car ils resteront ensemble pendant 3 ans.

Ma fille qui du coup a changé, est beaucoup moins agressive, je dirai même « heureuse »…

Début décembre, je prends part à un stage « conflits interpersonnels ». C’est quasiment de la thérapie de groupe. Pour commencer, chacun raconte pourquoi il est là. Et pour éviter d’en rajouter, nous écrirons notre texte, qu’un collègue devra lire.

Quand on en arrive à mon cas, quand je raconte Mende et la façon dont on a été traités, une jeune collègue et moi (je ne dirai rien d'autre) je sens un malaise dans la salle. Visiblement ces gens découvrent que le harcèlement existait déjà en 1994. Et du coup sont touchés par mon histoire. Notamment un autre collègue, avec qui j’ai bossé pendant mon service militaire, et qui deviendra mon confident numéro 1.

 

Profitant de cette période que j’estime propice, je vais jouer une partie très serrée.

Tout raconter à ma fille.
C’est toujours au bowling que ça se passe (ambiance feutrée, juste ce qu’il faut pour ce genre de choses) et je lui explique pourquoi je tiens tant à me fiche en l’air.

Je lui raconte tout, sans omettre quoi que ce soit.

Sonnée, ma fille – qui ne boit jamais d’alcool – prendra une bière pour se remettre de ses émotions.
Et me dit qu’elle ne peut pas m’en vouloir car c’était pour la préserver que j’avais fixé ce délai de 9 ans. Et en plus les sentiments ne se commandent pas. J’ajouterai qu’elle a l’air très admirative devant un tel amour.

Et encore un poids de moins !

C’est presque heureux – tout est relatif – que je m’apprête à aller passer mes vacances au Pays Basque, contrairement aux autres années où nous allions voir mon père. Mais tant qu’il ne se sera pas excusé, pas question d’aller là-bas.
De toutes façons, je suis tenu au courant au jour le jour par son voisin ! 

(à suivre)

 

 

18:18 Publié dans ceux que j'aime, moi | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : suicide