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06/09/2010

Plus que 46 jours avant la coupure...

Dans 46 jours en effet je déménage, et dans le Odou où j'habiterai, point d'ADSL. Que du bas débit, ce qui m'interdira pas mal de choses.

3600 étant mon débit actuel
56 étant le "bas débit", je pourrai aller sur la toile (3600/56) fois moins ! 64 plus précisément.

On m'a dit qu'en janvier l'ADSL arrivait dans mon village. Ce serait super, je ne demande pas ce dont je dispose actuellement, mais juste du nécessaire, que je ne sois pas oblgé de passer 20 minutes pour charger une page.

En plus il y aura deux interruptions : du 20 au 26 septembre, pour cause de stage, et du 13 au 21 octobre, nos vacances programmées depuis des mois et que nous ne pouvons annuler.

C'est dire qu'il va va falloir que j'accélère la cadence, si je veux que, le 13 octobre j'aie pu vous raconter l'essentiel de ma vie, vie qui s'est terminée le 30 aout 1997. Le reste c'est de la survie, également intéressant, mais qui peut attendre.

Ne vous étonnez donc pas si je "ponds" deux, voire trois notes par jour jusqu'à cette date.

Je vous embrasse

11:30 Publié dans Web | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : internet

02/09/2010

A dimanche soir

Mission à Colmar ce week-end. Probablement ma dernière.

J'ai bien compris la leçon de la dernière fois, et même s'il s'agit de quelques 60 heures, j'emmène mon épouse avec moi.

Financièrement, ça sera une opération "blanche", même négative, mais je n'ai pas envie que mon épouse se tape une crise.

Fatalement, le cyber sera impossible, aussi vous dis-je à dimanche soir, pour évoquer Frank Alamo !

Je vous embrasse

19:55 Publié dans moi, Voyage | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : colmar

La bande des 6 (1970/1971)

La période est en partie à-cheval sur l'époque de la note précédente.

En octobre 1970, j'intègre la fac. Changement total d'ambiance, les robes colorées des jeunes filles tranchent avec les blouses blanches Louis-Le-Grandesques, la fac est toute neuve (même en construction) ce qui change du bâtiment XVIIème siècle d'où je venais.

Je m'inscrivis tout de suite en section "sport", nanti de mes 10'8'' aux cents mètres qui m'avaient mis "hors-barême" pour le 80m du bac.

C'est un monde nouveau que je découvrais, on pouvait étudier "à la carte" ! Et en dehors des TP et TD notre présence n'était pas obligatoire.
Il y avait, en haut de l'échelle, le cours magistral en amphi, 300 personnes avec un prof très éloigné de nous (dans tous les sens du terme). Puis, les Travaux Dirigés, l'équivalent d'une classe de lycée, avec une vingtaine de personnes. Et enfin, les "colles", dont le sens n'avait rien à voir avec celles du lycée ! C'était des cours presque particuliers à 2, 3 personnes que nous faisaient les étudiants de licence ou de maîtrise.

Il y avait aussi les TP, Travaux Pratiques de chimie, branche dans laquelle je m'étais engagé.

J'eus comme "binôme" une certaine Annie. Avec laquelle je sympathisai immédiatement. Rien de plus, car mon coeur était déjà pris (voir note précédente). Du reste pas mal d'étudiantes venaient s'assoir à côté de moi en amphi, pour me faire la conversation !

Je restais sur un échec sentimental, une jeune fille de Franche-Comté pour qui j'avais fait les vendanges et que ses parents avaient enfermée pour ne pas avoir la tentation de poursuivre cette idylle. Je ne pensais qu'a jour où je pourrais y retourner, monté sur un cheval blanc, pour enlever ma belle.

Et je me lançai à corps perdu dans mes études. Ne ratant aucun cours, aucun TD, aucune colle, aucun TP.

Et quand vint le jour du "partiel" de maths, je pensais bien m'être débrouillé, au lycée ce que j'avais fait méritait au moins un 13/20.

Hélas, quand, début novembre, arrivèrent les résultats, je fus très déçu même si j'étais parmi les 50 premiers de l'amphi, je n'avais que 7/20 ! Méthode efficace pour décourager les "première année", qui marche toujours aujourd'hui.

J'avais repris mon entraînement aux 100m, sur un stade près de la Porte de Clignancourt, mais je m'aperçus très vite qu'il fallait que je m'entretienne ! Mes 10'8"" était devenus 12'1"", et peu à peu je recommençai à grapiller les précieux dixièmes.

Puis arriva la mort de De Gaulle, qui me permit de tenter de revoir ma "promise" en Franche-Comté et qui se solda par un échec magistral.

http://cicatrice.hautetfort.com/archive/2010/09/01/premier-baiser-premiere-rupture-1970.html


A mon retour, je n'avais plus goût à rien. Si je continuais à fréquenter les bancs de la fac, c'était pour faire plaisir à ma mère, mon père s'étant une fois de plus montré odieux à l'occasion de ce maudit retour.
Du reste pour moi cette année de fac était du "remplissage", avant l'Essentiel, le concours d'entrée  qui était la porte de la profession dont je rêvais depuis mes 12 ans. Mon père m'avait dit "passe ton bac d'abord", c'est ce que j'avais fait. Me faisant ainsi rater 3 années de travail, lesquelles m'auraient bien servi actuellement, pour ma retraite future. J'aurais pu alors partir sans "décote"... Merci Papa !

Les cours n'étant pas obligatoires, je les séchai donc, mais restaient les TD et les TP qui eux l'étaient.
Je dois beaucoup à mon binôme Annie, qui, mise au courant de mes déboires, faisait ce qu'elle pouvait pour me dérider lors de ces fameux TP, n'hésitant pas à mettre n'importe quoi dans les éprouvettes. C'était, 8 ans avant, "les sous-doués"...

Annie avait une amie, sa meilleure amie, qui s'appelait Danielle.
Et je me liai vite d'amitié avec ces deux jeunes filles, à qui je racontai mes malheurs Jurassiens.

 

C'est après les vacances de Noël que les choses s'accélérèrent. Par, si j'ose dire, "cooptation".

Annie tomba amoureuse d'un grand garçon, hypersympa, prénommé Michel. Et j'avais deux sentiments contradictoires en les voyant, se donnant la main, toujours serrés l'un contre l'autre.

1) que c'est beau, deux êtres qui s'aiment à ce point, mais
2) et dire que pour moi c'était encore ça il y a quelques mois...

La bande des trois devenait la bande des 4. Mais pas pour longtemps, car Michel emmenait dans sa "musette" un grand copain à lui, Clément.
Et de 5.

Mais Clément était amoureux de la "vieille" du TD, Claire. On l'appelait "la vieille" car elle avait  24 ans, ayant essayé diverses voies avant de se retrouver parmi nous. Et Claire vint tout naturellement nous rejoindre, la "bande des six" était née".

Curieuse bande en vérité car constituée de deux couples et d'un duo, Danielle et moi. Danielle qui je crois, n'aurait pas demandé mieux de constituer avec ma pomme un troisième couple.
Danielle ne m'était pas du tout indifférente, mais elle ressemblait énormément à Brigitte, la jeune jurassienne. Et en plus chez moi, les chagrins d'amour durant très longtemps, je n'étais pas prêt pour une nouvelle rencontre.

A partir de ce moment-là, la fac ne nous verra quasiment plus.
Certes pour nos parents respectifs on fera semblant d'y aller, on se lèvera à 7h30 et on prendra le métro, mais pour... se retrouver tous les sur le quai du métro Châtelet, ligne 7 direction Ivry, devant les premières classes.

Et quatre mois se passeront comme ça, de janvier à avril. Nous nous baladerons de tous les côtés dans Paris, et même en dehors. C'est avec eux que j'irai pour la première fois "en boîte", en fait à Paris des caves.
C'est avec eux que je m'initierai au bowling.
C'est avec eux que je vais tâter du fast-food, qui à l'époque ne s'appelait pas MacDo mais Wimpy.

Nous aurons nos quartiers généraux : Le matin, ce sera la brasserie "l'Etoile" où en guise de repas nous mangerons des sandwiches. Cette brasserie a d'ailleurs une histoire, que je vous raconterai un jour.
L'après-midi c'était le Bar de l'Odéon, juste à côté du Théâtre du même nom, où nous refaisions le monde en buvant des cafés (ce qu'il y avait de moins cher) et écoutant des chansons au Juke-Box. Nos préférées étaient "la vente aux enchères" de Bécaud et "qui a tué grand-maman" de Polnareff.

Danielle et moi regardions les deux couples s'enlacer, se bécoter. Parfois, quand nous nous baladions, nos mains se frôlaient. Mais ça n'allait pas plus loin, je n'étais pas assez "mûr" pour ça. Dans tous les sens du terme.

Un des plus beaux cadeaux que je recevrai de ma vie, c'est à eux que je le devrai. Un simple 45 tours, mais sur lequel tous avaient mis un petit mot.

Puis arrivèrent les vacances de Pâques, le break nécessaire pour faire le point
. Ce furent 15 jours en Lozère, comme l'année d'avant. Quinze jours merveilleux que je passai avec mon père qui voulait se racheter de sa conduite immonde de l'automne. Ma mère nous rejoignit pour 8 jours, et nous étions cette fois motorisés. Que des Solex, certes, mais nous n'étions plus tributaires des horaires de car.
En plus il fait beau et doux quasiment tous les jours, ce fut une parenthèse bienvenue.

Au retour, ce n'était plus ça. Les couples en avaient marre de "la bande" et préféraient - je les comprends - se retrouver en tête à tête. J'irai alors très souvent chez Danielle, écoutant Iron Butterfly (une chanson de 18 minutes) , Elvis et quelques autres. Nous discuterons énormément elle et moi. J'essayais de lui faire comprendre avec mes mots, mes pauvres mots de mec, que pour moi ce n'était pas facile, que j'aimerais tellement tomber dans ses bras mais que "quelque chose" m'en empêchait. Mais je ne connaissais rien de la psychologie féminine...
A tel point que vers la fin Danielle aura des doutes sur mon hétérosexualité ! Et il faudra que je m'invente un coup de foudre bidon pour une autre fille du TD pour faire stopper la rumeur naissante...!


De temps en temps quand même nous nous retrouverons à 6, dans un quartier où - je l'ignorais complètement - habitait celui qui allait devenir le parrain de ma fille.

Puis mai vit l'éclatement du groupe. Annie et Michel tinrent à m'accompagner pour passer mon concours professionnel, d'où dépendait ma future carrière.
Je devais les revoir trois ans plus tard, avec ma toute jeune première épouse, où nous partagerons un repas dans un resto sympa de la gare Montparnasse ("le Grenier") disparu depuis. Ils étaient toujours ensemble.

Et plus de 35 ans ont passé...



C'est par le site "copains d'avant" que je remarquai une certaine Annie N... qui avait fréquenté un lycée du XXème entre 67 et 70. A tout hasard, style Dubosc dans Sophie Boustier, je lui envoyai un message dans lequel je lui demandais grosso-modo si c'était pas elle la Annie avec qui nous allions au bar de l'Odéon avec 4 autres étudiants.
Et le lendemain elle me répondit, me disant que oui, c'était bien elle, et qu'elle était mariée avec deux enfants.

Et là, le plus beau. Un truc qui me fait rêver, moi la midinette masculine des blogs.
Car elle s'est mariée... avec Michel, celui de la fac. Le couple que j'ai vu se former sous mes yeux en 1970 est toujours là, 40 ans après... !
Il y a des choses qui vous réconcilient avec la vie. Ces deux-là n'auront donc jamais connu d'autre "partenaire" (beuark ce mot, ça me rappelle la belote) de toute leur vie.

Hélas, apparemment ils ne tiennent pas trop à me revoir, les appels du pied que je leur ai fait restant sans réponse. Mais je les comprends, nou nous étions quittés jeunes et insouciants (sauf moi lol), à présent nous sommes des presque-sexa avec un vécu très différent. Que pourrions-nous nous dire en dehors de "tu te rappelles à la fac quand..."

Je sais leur adresse mais je n'irai en aucun cas forcer leur porte !

Je vous embrasse.

01/09/2010

Premier baiser, première rupture (1970)

Tout le monde se souvient de son premier baiser...
Le mien, j'ai attendu l'âge de 19 ans pour l'obtenir. Une histoire, que je trouve très belle, même si elle est triste, et que je vais vous raconter.

Mes parents avaient décidé cet été-là de passer le mois d'Août dans le Haut-Doubs.

Je ne connaissais personne dans le Haut-Doubs, et j'étais prêt à parier à 100 contre un que j'allais m'ennuyer ferme dans ce coin de France, pourtant très joli, à un jet de pierre de la Suisse.

Je venais d'avoir mon bac, et mon père pour me récompenser m'avait payé... un vélosolex d'occasion !  Pas le truc noir que tout le monde a en tête, non, quand même, mais un solex "de compétition" avec freins à disques et arbre à cardan.
Mais d'occasion quand même.

Je ne m'étais pas trompé, malgré le solex, malgré la Suisse toute proche, les deux premières semaines furent pour moi très très mornes. Pour la première fois de ma vie, je n'attendais qu'une chose, le retour à Paris, la rentrée universitaire où j'allais côtoyer un monde nouveau - et mixte surtout ! - après les grises années lycéennes Louis-Le-Grandesques.

Pourtant le petit village était sympa, tout en longueur au milieu des "juralpages" (les alpages jurassiens !) vraiment parfait pour se reposer d'une année trépidante, mais à 19 ans, soyons justes, même en 1970 on a d'autres horizons...

Tout bascula le 16 août. Ce jour-là c'était la fête au village, et je fis la connaissance d'une jeune fille, Brigitte. Elle était un peu plus jeune que moi, et on se plut tout de suite.

Ce fut sur la chanson "Gloria" que l'un et l'autre échangeâmes notre premier baiser... Sensation si étrange sur le moment qui vous laisse ensuite avec une envie irrésistible de recommencer !

Aux 15 premiers jours de mortel ennui succèdérent alors 15 jours de rêve. Elle travaillait dans une épicerie pour se faire un peu d'argent de poche, mais tous les soirs nous nous donnions rendez-vous sur un banc près de chez elle, et là nous faisions de beaux projets d'avenir.
Lors d'une autre fête du village, les jeunes nous élirent carrément "le couple de l'année" tant nous étions mignons ! Oui, mignons, mais O combien naïfs...

Arriva ce foutu mois de septembre, celui qui brise les unions, et comme tant d'autres nous dûmes nous séparer, se promettant  - comme tout le monde - de nous revoir le plus tôt possible. Un mois après, très exactement, quand elle reviendrait de son mois de vacances avec ses parents, en Vendée.

Je ne rentrais en fac que le 25 octobre, j'avais le temps. Les hôteliers du village, émus par notre petit couple, m'offraient même la pension complète gratuite si je revenais ! Mais restait le billet de train.

Et là, mon père fut intraitable. Pas question de débourser le moindre centime pour aller revoir "cette petite paysanne"... Et puisque j'étais en âge de "courir les filles", je devais me donner les moyens de le faire !

Coincé j'étais. C'est alors que j'entendis une annonce à la radio. On recherchait des vendangeurs dans le Bordelais.
Pourquoi pas ? C'est vrai que j'étais aussi doué pour ce genre de choses que Laurent Roumejko en météorologie, et surtout je n'étais pas du tout mais alors pas du tout "physique". Mais quand même j'étais prêt à tout pour rejoindre ma petite fiancée.
Et je me lançai alors dans la grande aventure !

Ce coup-là, mon père était d'accord pour me payer le billet de train (pourtant bien plus cher !)...Rien que pour avoir le plaisir de me revoir revenir la queue basse le surlendemain.

Ma mère, elle, était angoissée en me voyant partir, et moi je n'en menais pas large non plus.

On m'en avait parlé, des vendanges, du fameux mal de dos qui élimine 80% des candidats les 3 premiers jours, des conditions plutôt éprouvantes.


Non seulement cela se révéla exact, mais le temps exceptionnellement caniculaire de cette fin septembre 1970 n'arrangea pas les choses. Gelée blanche le matin, avec parfois un brouillard à couper au couteau,  33 degrés à l'ombre l'après-midi... De toutes façons il n' y avait pas d'ombre !

Pour se désaltérer entre deux rangs de vigne, pas d'eau, seulement...du vin ! Du Graves quand même, mais du vin. Moi qui n'avais jamais bu autre chose que de l'eau...
Lever à 5 heures,  coucher à 23, dans des baraquements qui n'avaient rien du trois étoiles.

Je tins miraculeusement le premier jour. Mon sécateur à la main, je regardais le bout du rang de vigne, et je voyais Brigitte qui m'y attendait...

Le second jour ce fut encore pire, j'étais à deux doigts d'abandonner mais je savais pourquoi j'étais là, je ne devais pas flancher.

Le troisième jour je reçus une lettre de Brigitte, qui me disait entre autres " je t'aime tu sais, bien plus que tu ne peux le croire"...

Y avait-il un rapport ou pas ? Je pense que oui si j'en juge de mes exploits au sprint.
Le 4 ème jour mon mal de dos avait disparu, et à partir de là je me mis à foncer comme un malade ! On me surnommait "la formule 1 du rang de vigne" (rien à voir avec les hôtels, qui n'existaient pas encore !), à tel point que je devins le chouchou des patrons, content d'avoir un "employé" si zélé, à 15 francs (l'équivalent de 15 euros actuels) par jour... En plus, je faisais le clown tous les soirs, avec quelques imitations. Notamment celle du fils de la maison !

Comme je leur avais dit d'entrée, je ne restai pas jusqu'au dernier jour, la fameuse "gerbebaude"...
Je partis le 7 au soir, afin de retrouver ma Brigitte pour sa fête, le lendemain.
Toute la troupe au complet m'accompagna à la gare de Libourne pour prendre le train de nuit, je m'étais fait beaucoup d'amis pendant ces trois semaines, et certains le sont restés très longtemps.

 

 

1200 km de train plus tard, j'étais de retour dans le petit vilage, le coeur battant.

Mais elle n'était pas là. Ses parents l'avaient mise en pension, voyant d'un très mauvais oeil cette relation avec un "parisien"... Grâce à la fille de mes hôteliers, je parvins à la voir ...quelques minutes à travers une grille de son lycée. Elle pleurait, moi aussi.

Néanmoins je n'abandonnai pas. C'est De Gaulle qui vint à mon secours !
Plus exactement sa mort, ce qui occasionna un jour de deuil national. Si bien que j'avais un week-end de trois jours.  Ce qu'il fallait à mes voisins horticulteurs pour aller chercher des chardons. Et où ça donc ?  Oui, dans le Haut-Doubs.

Je sautai sur l'occasion pour leur demander s'il y aurait une place pour moi, la réponse fut oui, à condition que ça ne me dérange pas d'être serré et de voyager à bord d'une voiture d'avant-guerre !
Bien entendu je n'avais pas prévenu Brigitte. Je voulais lui faire la surprise. D'autant, m'avait-elle dit, qu'elle serait parée de ses plus beaux atours car elle était de mariage.

La Châtelaine Peugeot de 1938 roulait à fond, en ce samedi 14 novembre, sur l'autoroute en direction de ma bien-aimée. A fond, c'est à dire entre 65 et 70 km/h !!
Pouilly en Auxois, sortie pour Dijon, puis Dole, Salins, Levier et enfin Pontarlier. Ils me firent une fleur, celle de me déposer 10 km plus loin, dans le village de Brigitte où j'arrivai en pleine nuit.

Ses copains (copains version années 60/70) étaient surpris de me voir là, et admiratifs que j'aie accompli un tel exploit. Là-bas, tout était blanc, et le village en était tranformé...
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Rien à voir avec l'été.

Le lendemain, alors que les cloches sonnaient, d'un pas hésitant je me dirigeai vers le cortège, dans lequel je vis ma Brigitte avec une belle robe et des fleurs dans les cheveux. Elle manqua de défaillir quand elle me vit, et me fit signe qu'on se verrait après.
Les minutes étaient longues, et quand enfin le cortège fut terminé, c'est non pas Brigitte que je vis, mais sa soeur.
Qui me dit "va-t'en, ma soeur ne veut pas te voir".
 
Le coeur arraché, je m'en allai vers ma pension où les hôteliers faisaient ce qu'ils pouvaient pour me consoler.
Le lendemain, départ pour Paris, et durant le trajet, je n'avais qu'une obsession : qu'une voiture venant d'en face nous percute...
A Noël je lui envoyai une lettre, et par retour du courrier elle confirma qu'elle ne voulait plus me voir, en disant : "je ne veux pas m'engager à quinze ans."

Les années passèrent, 2 très exactement. Et en ce mois d'octobre 1972 j'étais avec une jeune fille, qui allait devenir ma femme. La première. Brigitte vint sur le tapis, et elle me demanda comment ça s'était passé.
Je lui racontai tout d'un bout à l'autre, et comme ma fiancée était très romantique, elle était très émue de mon récit.
Mais elle était également méfiante, et, carrément, écrivit à Brigitte pour lui demander des explications. Lui précisant qu'on allait se marier et qu'elle voulait savoir si je racontai ou non des bobards.
Brigitte lui répondit dans la semaine, disant que ses parents lui avaient bourré le mou, et qu'ils l'avaient persuadée que j'étais venu... pour l'espionner ! Qu'elle regrettait, et qu'elle avait de la chance d'être tombée sur quelqu'un d'aussi romantique que moi. Se taper les vendanges uniquement pour revoir une jeune fille, on devait être peu dans ce cas...


Le temps passa encore, chacun fit sa vie. Elle se maria, moi aussi.  Et, pendant 30 ans, j'évitai soigneusement ce petit village.
Ca me faisait mal. Les rares fois que j'avais à le traverser (il est situé sur une route internationale) c'était une véritable épreuve. S'ils avaient mis un radar, j'aurais eu mon permis de retiré depuis longtemps....

En 2002 j'étais très mal. Très très mal, et je sentais au fond de moi que j'avais atteint la fin de "mon voyage". Et je décidai alors de passer 8 jours là-bas. Juste avant de tirer ma révérence.
Ma femme et ma fille étaient contentes que j'accepte enfin de faire ce deuil. Sans trop savoir pourquoi.

Pendant cette semaine, malgré un soleil radieux, je n'étais pas très bien, j'avais une drôle de sensation...Toujours cette satanée hyperintuition !

Et le dernier jour, le vendredi, sur l'insistance de "mes nanas" (qui certainement voulaient en finir avec cette histoire), je me décidai quand même à me rendre chez elle.
J'y trouvai alors une dame, qui me déclara être sa belle-soeur. A l'évocation de Brigitte, je vis son visage se fermer.

"Vous la connaissez" ?

Je répondis que j'avais été son premier amour.
Et là je vis son visage presque s'illuminer l'espace d'un instant puis, m'avoua alors que Brigitte avait depuis longtemps quitté le village.

Qu'elle avait habité la Vendée, à quelques deux heures de voiture de chez moi à l'époque.

Et elle m'apprit aussi... qu'elle était morte du cancer deux ans auparavant.

J'y passerai plein de fois, dans le petit cimetière de Saint Avaugourd des Landes, pour fleurir celle qui fut mon premier véritable amour. J'y ai déposé une plaque :"à mon amie". Cela par rapport à son mari et ses enfants, dont j'apprendrai plus tard qu'elle leur parlait de temps en temps de moi...

 

 

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