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02/11/2010

Encore plus bas (octobre 1997/février 1998)

Aujourd'hui
8 ans
zéro mois
et 1 jour...
1er novembre 2002, jour de Toussaint où je la verrai pour la dernière fois....

 

 

 

                                         ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥ ♥

 





J'en étais donc arrivé à ce fameux dimanche d'octobre 1997 où elle me disait ne plus y croire, et préférait que l'on ne se contacte plus. Elle avait même ajouté : Nous deux on n'est rien face à tous.

Je pensais, à ce stade, avoir touché le plus profond. Et bien non....

Fin novembre, ma chère et tendre s'aperçoit que le crédit foncier lui avait monté un joli bateau (normal à Vannes ! ) et qu'en fait, ce n'est pas 4000 francs que l'on devra débourser tous les mois (ce qui nous faisait déjà serrer la ceinture) mais 5200....

Un peu désemparé quand même, je téléphone à mon père, qui se vante (et ça se révélera vrai) d'avoir un joli matelas d'économies. Lequel m'envoie me faire voir...
Je m'en doutais un peu, et ma foi, je me dis, dans mon brouillard, "on verra bien...."

Début décembre, c'est au tour de mes parents d'être fichus à la porte de chez eux. Le propriétaire vendait leur logement, et ce pour une somme dérisoire. Plus tard je m'apercevrai donc qu'ils avaient de quoi s'acheter 4 ou 5 fois leur appartement. Mais mon père préférera faire le canard, afin de garder ses sous, et ne se rendra compte de sa connerie qu'une fois le camion de déménagement sous leur porte.
Ils aboutiront dans un trou à rats du centre-ville, ayant dû chercher en catastrophe.

Je passerai les détails mais toujours est-il qu'il n'est plus question d'aller là-bas à Noël, ce sera pour les vacances de février. 

Quelques jours avant le départ, le 4, je suis au boulot.
Et j'entends le téléphone sonner. La même sonnerie qui m'avait annoncé le lâchage de Nathalie.
C'est mon épouse.

"Pat, tu es assis ?
- Oui, pourquoi ?
- Ta mère est morte cette nuit..."

Merci pour le tact....

Et c'est là qu'on pourra mesurer mon degré de zombisme, car au lieu de m'écrouler, au lieu de pleurer, au lieu de me jeter par la fenêtre, je vais dans le bureau du chef pour demander... la permission d'aller enterrer ma mère !

Encore merci les comprimés, grâce à eux, je n'étais pas très conscient de se qui se passait.

Mais une partie de moi s'est quand même réveillée, pour penser à mon père. Il fallait le préserver. Alors j'appelai son toubib pour lui demander de l'hospitaliser, le temps que le choc soit passé.

Départ en trombe vers les 10 heures. Je me souviens vaguement avoir déjeuné dans une cafet' à Niort.
Puis de faire étape à Rodez par une nuit glaciale. La bouteille d'eau était devenue un bloc de glace dans la voiture...

Et c'est à Millau, sur la route qui m'était devenue familière au fil des ans, la route qui allait chez mes parents, qu'une partie de moi commence à craquer.
"Je ne veux pas y aller, me lamentai-je comme un enfant.
Devant ma fille de 13 ans et demie qui pleurait et mon épouse qui - comme mon ancien chef - est toujours excitée par le chagrin d'autrui.
- je t'en prie, voyons, tiens-toi..."

Non, je ne lui rappellerai pas ce qui s'était passé 16 mois auparavant, quand c'était elle qui avait perdu sa mère. Pas la force.

Arrivée dans les Cévennes. Dans ce qui était au début la ville de l'amour, puis la ville du divorce.
A présent c'était - et ce sera définitivement - la ville de la mort.

D'abord l'hôpital. Voir mon père, et pour mon épouse, voir la dépouille de ma mère.
Un cas psychologique, ça : elle est attirée par les cadavres, une sorte de fascination comme celle qu'on peut ressentir à l'approche d'un orage. D'abord on l'attend, puis on est terrifié. C'est un peu la même chose.

Mon père semble avoir bien récupéré, discutant le coup avec son voisin de chambre qui comme lui est né à Marseille.

Il sortira le lendemain, pour assister à l'enterrement.

C'est vraiment un trou à rats que je découvre en entrant dans ce qui sera désormais "son" appartement.
Pour y accéder, un escalier extérieur métallique, qui donne dans un vieux couloir sombre. L'horreur... Je n'y mangerai que 2 ou 3 fois et jamais je n'y dormirai.

Je fixe du regard le lit à côté de la chambre de la cuisine. Là où voici 48 heures mon père découvrait sa femme morte dans son lit.

En fait, je n'en ai pas la preuve formelle, mais beaucoup de faits me font conclure à un suicide.

Dans la famille on se suicide pas mal en février !

L'enterrement est lugubre. Alors que pour feu ma belle-mère une énorme église était remplie, avec des monceaux de fleurs, là, seuls quelques curieux s'y trouvent, que je ne connais pas.
Mais ma pauvre mère n'était pas une riche commerçante...

Personne de ma famille, qui n'avaient pas le temps matériel pour venir. Mon cousin Robert (qui lui aussi deviendra un frère pour moi on le verra) est en Thaïlande, ma cousine Ginette est à Montpellier mais son mari lui a interdit de venir, même coup que pour mon second mariage.

J'ai un haut-le coeur quand je vois arriver une fourgonnette Renault Express cabossée, duquel... on extrait le cercueil.

Et puis j'ai "disjoncté".
Pour moi c'était trop, tellement trop que dans mon imagination ça ne pouvait être qu'un rêve que je faisais. Comme on dit souvent dans les romans de gare, j'attendais d'une minute à l'autre de me réveiller dans mon lit en sueur.

Pour ma pauvre petite fille, ce n'était pas le cas. Elle vivait tout ça à 100 %. A 150% même.
Sa mamie, peut-être la personne au monde qu'elle aimait le plus, n'était désormais plus là....
Elle versera des tonnes de larmes.

C'est le lendemain que je me réveillerai de mon "disjonctage", que je me rendrai compte que tout ça était vrai, et alors j'aurai le sale réflexe de vouloir partir le plus vite possible. Réflexe égoïste vis à vis de mon père mais je ne pouvais pas rester une seconde de plus dans cet endroit, dans cet appartement, dans cette salle à manger où les cendres de ma mère trônaient dans une urne sur la cheminée.


Le soir même nous serons à Limoges. Et nous coucherons dans le même hôtel qu'en septembre dernier. Mais cette fois-ci, ce ne sera pas Nathalie que j'appellerai de la cabine, ce sera mon père.
Il était 19 heures, et désormais, tous les jours, où que je sois, je l'appellerai à cette heure précise.
Et, sans portable !
Durant les 40 années précédentes nous nous étions appelés même pas dix fois, là ce sera pas moins de... 1800 appels quotidiens que, pour me rassurer, je lui passerai.


De retour à mon boulot, alors qu'on m'envoie des "condoléances" sans en penser un traître mot, mon chef me convoque à son boulot pour me dire que désormais je devrai manger sur place le midi, les collègues en ayant marre, et de mon travail, et de ce qui était mes "privilèges".

Texto.

A partir de ce jour, je ne pourrai vivre que dans l'espoir. Comme tous ceux qui sont complètement au fond du trou, et qui ne peuvent, par définition, que remonter.

Et j'aurai tort....


(à suivre)

12/10/2010

L'arrachement (août 1997)

Face à ce cataclysme, nous allons encore avoir un tout dernier sursaut, en écrivant aux syndicats.

A présent, en 2010, il est certain qu'un "responsable" écrivant noir sur blanc que le fait qu'une jeune collaboratrice ne lui serre plus la main nuisait à son équilibre personnel ne ferait pas de vieux os dans une boîte, quelle qu'elle soit. Mais nous ne sommes que début 97 et le harcèlement moralo-sexuel n'est pas encore entré dans les mentalités.

Les syndicats nous répondront, penauds, qu'ils ne peuvent rien faire.
Et Nat n'a d'autre choix que de poser une mutation. Dans un grand centre, car elle ne veut plus entendre parler de petites unités.

Et là, moi je décroche, complètement. Je retrouve mes comprimés, mon lit, mon zombisme et ma transpiration. Je ne veux plus entendre parler de quoi que ce soit, je ne veux plus être là, qu'on me laisse tranquille. Je suis tellement KO que je n'ai même plus la force de me tuer...

Je poserai également une mutation. Enfin, mes nanas rempliront la feuille que je n'aurai qu'à signer.
Je Elles inscriront Vannes, Lons le Saunier, Briançon et Belfort.

Je ne veux pas me dédouaner en disant cela, mais vraiment, je suis tellement sonné, écoeuré et surtout découragé que je ne suis plus capable de prendre la moindre décision. 
Pour "illustrer mon propos" - comme dirait l'autre enflure - je ne suis même plus capable d'effectuer les gestes quotidiens. Par exemple c'est ... ma fille qui me fera mes shampooings !

 

 

 

                                            °°°°°°°

 

 


J'ai sincèrement du mal à faire une chronologie des derniers mois.

J'aurai ma mutation, pour Vannes, alors que Nat ne l'aura pas pour là où elle l'a posée.

Je me souviens que j'étais au lit en permanence, et qu'au taf je dormais en arrivant au boulot. Mais je dormais VRAIMENT, allongé sur le sol ou la tête entre mes mains.

Je me souviens de la semaine de juin passée à chercher un appartement en Bretagne.
Je verrai mon cousin Jean-Yves à cette occasion, qui me dira "avoir vraiment peur" de l'image que je renvoie...

Un autre souvenir aussi, ma fille, qui me demande de lui acheter un VTT. Alors qu'on part un mois après ! Mais je le lui achèterai, sans regarder le prix. Je m'en fous, je me fous de tout.

Encore une anecdote, en vrac. Elle date de l'été, mais impossible de préciser quand.
C'est au cours d'un repas à 4, Nat, découragée par le monde du travail, Nat qui est vous le savez très pieuse, nous confie qu’elle envisage éventuellement de devenir Religieuse. De fait j'étais persuadé qu'elle était vraiment "d'ailleurs" comme l'avait chanté Bachelet. Et j'en aurai la confirmation 4 ans plus tard. Mais nous n'en sommes pas là.
Quand ma fille lui suggère « Soeur Nathalie des Anges », ça sonne bien...
- Non, je ne prendrais pas ce nom-là..
- Ah ? Tu t’appellerais comment ? » Et là, la tête vers le bas Nat dit simplement:
« Soeur Marie-Patrick »...

Finalement elle trouvera quelque chose pour échapper aux griffes du tortionnaire : un congé - formation  où elle étudiera à Bordeaux en licence de psychologie !

Ah si...

Je me souviens du week-end des 23 et 24 août.
L'adieu à mes parents, dans les Cévennes.
Ma mère sait que désormais, nous ne pourrons plus venir tous les deux mois, comme nous le faisons depuis 11 ans. A présent, la distance sera tellement grande (deux jours de route) que cela ne sera qu'une ou deux fois par an. En outre elle sait que je ne conduis plus.

Malgré mon état, je reverrai distinctement ma mère nous accompagner en larmes à la voiture. Mon épouse aura du mal à démarrer. Finalement on décollera, et je reverrai toujours ma mère en larmes dans le rétroviseur.
Ce sera la dernière image que j’aurai d’elle, elle mourra 5 mois plus tard, de chagrin.

 

Je revois notre dernière danse, à Nat et moi.
C'est au cours d'un bal de village, je fais tapisserie regardant danser Nat et ma fille.  Ca "Macarénise" à tout va quand arrive un slow. Lucie, de Pascal Obispo.

Nat me regarde. Moi je pense à Agde, à la plage, deux ans et demie avant. Cette fois je ne lui ferai pas d'affront, et nous le danserons ensemble, ce slow. Devant tout le monde.
Et là je vois ma fille qui tire une tronche pas possible... Nat va s'en apercevoir, et les larmes aux yeux me dira "Tu vois, Pat, inutile de lutter, on est vraiment seuls contre tous les autres"...

Comme le chantait Cabrel 17 ans plus tôt...

Mais puisqu'on ne vivra jamais tous les deux
Puisqu'on est fous, puisqu'on est seuls
Puisqu'ils sont si nombreux
Même la morale parle pour eux
J'aimerais quand même te dire
Tout ce que j'ai pu écrire
Je l'ai puisé à l'encre de tes yeux.



                                           °°°°°°°



Le déménagement se fera une fois de plus sans moi, pas la force ni morale ni physique de le faire...

Et arrivera ce maudit 30 août.

15h13. Le camion de déménagement est déjà parti, mon épouse m’attend dans la voiture.
Nat est de service - comme par hasard - ce jour-là , et tous les deux nous sommes enlacés dans le bureau directorial, pleurant tous les deux sans pouvoir nous interrompre.

Nous n’arrivons pas à nous séparer physiquement, sachant bien que le moment où nous pourrons à nouveau nous serrer l’un contre l’autre relève de l’inconnu.
Moi je pars pour la Bretagne, elle à Bordeaux. On se dit, on se jure que l’on restera en contact. Malgré tout ce qui est contre nous. Notre amour hors du commun saura résister à ma maladie, à la distance, au temps.
On se mariera comme on se le promet depuis 4 ans et on se fera les trois beaux bébés que l'on a "programmés". Le jour où l’on saura que ça ne fera de peine à personne. On a le temps, on est encore jeunes.
Par un effort surhumain, j’arrive à me détacher d’elle, de son corps, de sa voix qui me dit un dernier «je t’aime» désespéré.
Je fonce – c’est le mot – à travers le jardin, sans me retourner, passe en trombe le portail et m’engouffre dans la Micra où sur l’autoradio j'entends "en cloque" de Renaud. Une chanson que désormais je ne pourrai écouter qu’en pleurant… Pas plus tard qu'hier, en passant.

Ce week-end là la Princesse Diana va trouver la mort. Tout comme Mère Térésa.

Et moi...

Voilà comment un couple fusionnel - mais interdit - qui a quand même duré quatre ans, a pu être séparé sans que ni l'un ni l'autre ne le désire. Sans qu'aucun des deux ne prenne l'initiative de la rupture.

montsouris.jpg

 

L'acharnement - 7

Je vais, ce jour-là, rassembler toutes les forces qui me restent pour "assurer".
D'abord, boulot, j'appelle chef adoré qui me dit "rien de prévu pour le décès des beaux-parents, démerde-toi avec tes collègues".
Un collègue est heureusement partant pour une permutation, j'ai ainsi 4 jours de libre. Pas un de plus !  Puis je fonce chez moi, et vois mon épouse dans un état pas possible.
"J'y vais", me dit-elle, en empoignant une valise.

Là, gros dilemme. Y aller toute seule en voiture, dans son état, c'est l'accident assuré.
En train, le dernier qui pouvait nous faire arriver là-bas ce soir est déjà parti...

Ne reste qu'une seule et unique solution : Que je l'emmène là-bas en voiture. Oui, je sais, là aussi risque d'accident, mais nettement moins que si elle partait toute seule.

Et notre fille? Lui faire manquer le collège? Pas possible, elle redouble. La laisser toute seule? Elle n'a même pas douze ans... Et dire que Nat est à l'autre bout de l'Europe...
Finalement, nos voisins vont s'en occuper, lui faire à manger, elle ne restera à la maison que pour dormir.

Et c'est ainsi que par la grâce de Dieu, j'ai pu rallier le soir même Orléans. J'ignore encore comment j'ai pu effectuer ces 500 bornes, mais j'y suis arrivé. Si, vraiment, à la grâce de Dieu !

La Normandie est atteinte le lendemain midi, et je revois à nouveau ces visages pleins de détresse. Je détestais ma belle-mère, mais vraiment, de voir ces gens pleurer me bouleverse complètement.

C'est moi qui ferai la lecture à la messe, avec mon intonation de zombie.

Au retour, je passerai le volant à mon épouse, et dormirai sur tout le trajet....

C'est Nathalie qui à son retour la réconfortera le plus. Sa bonté a encore pris le dessus sur son exaspération, la hache de guerre est définitivement enterrée.

Mon épouse sera mise immédiatement sous prozac, mais celui-ci ne fera pas effet tout de suite.
Et un jour elle va se pointer au boulot, pour reprocher à chef adoré... de ne pas avoir envoyé de fleurs à sa mère !
L'autre ne prend pas de gants, et l'envoie balader sans ménagements.
"N'importe quoi... j'aurai vraiment tout entendu"...
Il ira même plus loin la semaine d'après : il interdira carrément à mon épouse l'entrée du bureau.
"Si tu entres, j'appelle les gendarmes" lui dira-t'il...

On mesurera là la vertigineuse connerie du bonhomme qui avait là une occasion unique de casser définitivement le couple Patrick et Nathalie en se mettant dans les petits papiers de mon épouse! Mais sa méchanceté naturelle a eu le dessus.

Je n'ose à peine imaginer ce que l'on aurait enduré si le monsieur, en plus d'être méchant, avait été intelligent. Là nous n'aurions pas "duré" longtemps je crois.

 

Alors que la pression de mon épouse va devenir de moins forte, peu à peu Nat et moi commençons à reprendre un peu - un tout petit peu - de poil de la bête, mais lui va cogner de plus en plus fort.

Mon épouse commence à avoir une petite idée de ce que je (nous) subissons au boulot, et se rend compte que sans Nathalie, je me serais depuis longtemps laissé couler. Et pas que dans mon lit...
Elle réalise certainement aussi à quel point elle a été odieuse, à quel point elle a profité de cette situation.
Mon épouse qui est aussi intelligente, et qui sait également que c'est une énorme bataille que nous livrons, et que pour la gagner, il ne faut surtout pas se disperser.

Et puis, je suis persuadé qu'elle sait depuis longtemps pour Nat et moi, un amour qui ne passe pas inaperçu. Elle a compris les longs "raccompagnements" du soir, elle a compris aussi mon attitude prostrée à chaque fois que je reviens de Marseille.
Certes, elle ne peut pas approuver - elle n'est pas maso - mais je pense qu'elle est admirative par rapport à une femme d'exception, et aussi un amour d'exception. Et surtout elle sait que si elle déclenche la guerre atomique, alors là je n'hésiterai pas une seconde....

Du coup,  nous ne nous sentons plus obligés de nous comporter comme si nous vivions nos dernières heures, et à présent, nous allons être plus "mesurés", avec la ligne bleue de l'an 2002 en point de mire.

Du coup aussi - de mon propre "chef" - sourire- je réduis sérieusement les médicaments. Sérieusement et progressivement.

Entre le prozac et Nat, mon épouse se rétablit peu à peu de la mort de sa mère, et du coup organise un week-end en Espagne pour le 11 novembre. Pour moi, malgré mon "zombisme" prononcé, mon amour du lit, c'est oui si Nat vient avec nous.
Elle viendra.
J'ai quelques souvenirs de ces trois jours, où j'avais toujours ce mal fou à m'extirper de mon lit...Mais où j'ai pu apprécier une balade le long du littoral.


Autre souvenir, celui d'un stage à Toulouse, stage de 5 jours que nous avions refusé de faire l'un sans l'autre. Nous étions logés dans les logements de l'Ecole de la Météo, dans deux chambres contiguës. Bien évidemment, la mienne restera vide !
Mais je ferai une découverte, lors de ce stage. C'est qu'au bout de 3, 4 jours, j'arriverai à me "dézombiser". A la grande joie de Nat, je me surprendrai  à... m'exprimer, durant la pause de midi, m'exprimer, comme "avant", face à notre formatrice.
Serais-je "sauvable" ?



La réalité va vite nous rattraper. La grève des routiers nous bloque, et nous rentrons avec un jour de retard. Et là, notre tortionnaire va téléphoner chez moi !
"Si ton mari ne prend pas son service demain matin, il devra en assumer les graves conséquences..."
Un temps, puis :
"Mais au fait, j'avais dit que je ne t'adresserais plus la parole !"
Et il raccroche...

Oui, je sais, on pourrait presque faire une bonne comédie dramatique avec tout ça. Les personnages sont tellement typés ! Mais hélas ce n'est ni théâtre ni cinéma.


Et les réunions continuent, de plus en plus ciblées. A présent, plus besoin de passer par le biais des "questions diverses" pour que Nat et moi s'en prenions plein la poire...
A tel point que Nat va refuser un beau jour de lui serrer la main. Pourquoi serrer une main qui vous étrangle ?

Car à  présent, Nat prend peur.
Peur physique d'un individu incontrôlable. Et c'est pour ça qu'elle ne mouftera pas quand il lui imposera - non vous ne rêvez pas - du boulot à la maison !!!

Bien entendu, dans la (faible) mesure de ce qui reste mes moyens je l'aiderai du mieux possible, et c'est comme ça que nous passerons tous les 4 l'après-midi et la soirée du premier dimanche de 1997 à travailler pour éviter que Nat s'en prenne plein la tronche.
Dans la bonne humeur, quand même....

 

Vacances de février. Mes nanas vont une nouvelle fois en Normandie, je dois les rejoindre à la fin. C'est là que j'aurai une révélation.

Ca se passe dans le Corail Paris-Le Havre. Je suis dans un compartiment, suant et somnolant. C'est fou ce que j'ai pu dormir dans les trains à cette époque-là...
En face, une dame et sa fillette de 3 ans.
Qui me regarde fixement et finit par demander :
"Dis maman, pourquoi il est bizarre le monsieur ?"

Ce jour-là je toucherai le fond, j'arrive à faire peur aux enfants, moi qui d'habitude les attire comme des mouches !

Mais enfin, nous tenons bon la barre, envers et contre tout. Nous commençons même à envisager l'hypothèse de l'existence possible d"un éventuel bout de tunnel.

Et c'est alors qu'il va employer l'arme suprême.

Un matin, il arrive à l'heure.
Déjà, là on s'inquiète. Pas normal pour un type qui se pointe régulièrement à 10 h.

Puis il se met à taper frénétiquement sur son clavier.
Il arrive à l'heure et il bosse, il est malade ou quoi ?

Ce n'est que vers 13h qu'il sortira de son bureau, l'air conquérant, pour donner une feuille à Nathalie.
"Signe !"
Nat lit, signe, et se met à pleurer. Sans pouvoir s'arrêter.
Elle me la tend, en m'implorant :"Pat, aide-moi"...
Et c'est à mon tour que je me suis mis à pleurer.


C'est fini...

Cette feuille, j'ai pu, des années après, me la procurer.

Ne tenant pas à donner le bâton pour me faire battre, je n'en livre pas ici la photocopie. Je ne la "publie" pas. Mais elle est disponible à tous ceux qui me la demanderont par mail. Bien entendu sans aucun nom de personne ou de profession.

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Mende, le 12/03/1997

Objet : Demande de mutation pour Mlle xxx Nathalie.

 

M. Le Directeur,

   Mlle xxx Nathalie a un comportement résolument asocial pendant ses heures de travail. Elle refuse tout changement qui n'a pas reçu son aval ou dont elle n'est pas à l'origine, elle s'emporte très facilement et ne s'entend plus avec 3 de ses 4 collègues.
Elle fait manifestement preuve d'un mauvais esprit. Son attitude est très préjudiable dans notre contexte de petit centre où un minimum d'esprit d'équipe doit prévaloir puisqu'il n'y a aucun cloisonnement des tâches.
   Pour illustrer mon propos, je ne citerai que son refus de s'abonner au téléphone pour éviter d'être dérangée par ses collègues en cas d'imprévus modifiant le tour de service.

   Elle refuse dorénavant que je lui serre la main en arrivant au bureau, nous en sommes arrivés au degré zéro des rapports humains.
   Cette situation conflictuelle qui vient s'ajouter aux autres problèmes humains du centre dont j'ai eu l'occasion de vous parler nuit à la bonne marche du service et ne favorise aucun épanouissement personnel et surtout pas le mien.

   (... ) Puisqu'elle m'en donne l'occasion, je tiens à vous dire qu'à mon sens, le départ de Mlle xxx Nathalie est tout à fait souhaitable.

    Je vous prie de croire, etc.

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( à suivre)

15:39 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (3) | Tags : dépression, persécution, deuil

11/10/2010

L'acharnement - 6

Toujours 1996. Vacances de Pâques avec la micra. J'ai quelques bribes de souvenirs, sans pouvoir parvenir à y mettre de date précise. Je sais que nous alllons à Lorient, près de ma famille, qui ne se privera pas de m'affubler de noms d'oiseaux. "Le zombi" pour le père de Jean-Yves - ce qui était tout à fait exact - "le crado" pour mon cousin/frère Jean-Yves lui-même, en évoquant mon odeur de sueur et mes cheveux gramouillés. Ca ça se reconnaît aussi à l'odeur, un dépressif...

Durant ces vacances, je me laisserai balloter au gré des vents, au gré des personnes. Je me contenterai de suivre, durant les rares moments où je ne serai pas à transpirer dans mon lit. Certes, il n'a pas fait beau, ce qui - côté lit - m'a simplifié la tâche !

Je me souviens d'une balade à Pleumeur-Bodou, près de Lannion, une balade qui m'aurait enchantée ne serait-ce que deux ans plus tôt, mais qui fut un véritable supplice...

Et je me souviens surtout d'une réflexion de Natou, pendant une des 3 conversations téléphoniques que nous allons avoir.
Là aussi, de plus en plus dur de m' "échapper" afin de trouver une cabine pour appeler ma bien-aimée.
Elle me lancera cette phrase : "c'est drôle, depuis que tu es parti je me sens mieux..."


C'est sûr, j'étais en train de lui bouffer les quelques forces supplémentaires qu'elle avait en plus, je l'entraînais vers le bas. Surtout, étant une personne exceptionnelle, elle ne comprenait pas que face au Mal, à la dépression, je ne réagisse pas comme elle.

Mais j'étais loin d'avoir atteint son degré à ce niveau !
                                 

Et là va commencer une période de 5 mois où elle va s'éloigner de moi.

Notre tortionnaire le voit, et change alors la règle du jeu pour les emplois du temps. Désormais "dans un souci d'assouplissement", nous pourrons chacun choisir les jours où nous voudrons bosser, et avec qui nous voulons bosser. Ce "rite" se situera avant chaque réunion mensuelle, et il ne pourra cacher sa joie quand Nat fera exprès de mettre son nom à côté d'un autre collègue...
Puis elle va prendre ses congés, à la suite. Pour des destinations lointaines, comme la Réunion, Venise, les Lacs Italiens...

A partir de là, je me laisse couler.
A pic.

Je vais passer à côté de beaucoup de choses, dont deux cérémonies familiales importantes.

Les 60 ans de mariage de mes parents, d'abord. Je ne m'en souviens que grâce à la photo où l'on me voit, effectivement, dans un état de décomposition avancée.

Et la communion solennelle de ma fille d'autre part, que j'ai "survolée". 

J'espère qu'elle m' a pardonné aussi mon peu d'enthousiaste devant son gala annuel de danse classique cette année-là (ma fille, à 12 ans, était danseuse classique, de haut niveau) ...

Et puis des trucs que j'ai découverts plus tard, comme par exemple que mon épouse avait voulu devenir nounou, et qu'elle avait gardé un gamin pendant trois semaines. Je devais être dans mon lit pendant ce temps, lit que je ne quitterai plus désormais que pour m'asseoir dans le canapé regarder la chaine que mon épouse a programmé .
"Je passe à la télé" "questions pour un champion" et "qui est qui" seront ma grande trilogie, avant le salvateur "Bonne nuit les petits" !


J'interromps de moi-même mes émissions de radio hebdomadaires, me sentant incapable d'une part de faire les 900m à pied jusqu'au studio, et d'autre part de faire une émission correcte. Car si je n'arrive plus à conduire depuis un an, je n'arrive plus non plus à écrire et je n'arrive plus non plus à parler devant un micro. Il est loin le Patrick qui, 12 ans auparavant, faisait vibrer les foules...

Ma démarche est à présent celle d'un drogué, et - je ne mens pas - j'éviterai de passer par une certaine place pour aller au boulot, car la bande de gamins qui y joue me lancera des pierres en m'appelant "Vichnou" ...


Pire encore ! Jean-Yves débarque début juillet, pour une semaine. Et en plus le hasard veut que j'aie cette semaine-là en congés ! Mon cousin/frère chez moi, ça n'était pas arrivé depuis des années.
23 très exactement, au temps où j'étais la star de mon département !

Là encore, peu de souvenirs, sinon un truc que mon cousin essaiera de faire fonctionner, mais sans succès, car pas encore prévu pour la Lozère : le téléphone portable...

Je revois aussi ma fille en vacances, avec son passe-temps favori : balancer ses copines dans la fontaine en bas de l'immeuble et s'y faire balancer aussi... J'imagine que l'été a dû être chaud. Moi je n'en ai aucun souvenir..

Puis vient le moment des vacances. Il est prévu la Normandie puis l'Alsace, en finissant comme tous les ans à Lons le Saunier.

La fin de cet été 1996 va être l'horreur absolue pour mon épouse.
D'abord, dès qu'on arrive en Normandie, on lui annonce brutalement la mort de sa tante, un femme qu'elle a toujours adoré. Le séjour sera réduit aux funérailles. Sympa pour elle !

Puis direction l'Alsace, où l'on a réservé un gîte à Eguisheim. C'est sans doute un des plus beaux villages d'Alsace, et habiter en plein milieu est un privilège. En plus il fera super-beau pendant ces 8 jours.
Où, en dehors de 3 après-midi, je... resterai presque en permanence à transpirer dans mon lit ! Deux lits jumeaux de 90 dans la chambre, heureusement pour mon épouse car les draps seront trempés tous les soirs !

J'ai aussi le vague souvenir d'avoir été à Europa-Park, le Disneyland Allemand. Là encore, au lieu de m'amuser, je subissais, en essayant de "faire semblant" pour ma fille, ma fille qui méritait bien de s'éclater..
Puis Lons le Saunier où le canapé de notre vieil ami m'a encore plus vu que l'année d'avant :(

Mais cette année, une chose se passe. J'ai la hantise de retourner à Mende.

Qu'est-ce qui m'attend là-bas ? Un appartement sinistre, un chef de plus en plus redoutable, et une Nathalie qui - c'est ce que je pense sur le moment - ne m'aime plus. Non merci...
Et de la même manière que ma fille disait l'année d'avant "non, je ne veux pas aller à la colo", là c'est "non je ne veux pas retourner en Lozère.."

Deux surprises de taille m'attendent, au retour.

D'abord, dans ma boîte aux lettres, un billet doux du tortionnaire me disant que j'avais commis une faute et qu'il fallait que je me présente le lendemain à son bureau :(
Et au répondeur, Nathalie.
Une Nat affolée :
"Viens vite, je t'en supplie !!!"

Appel daté de moins d'une heure, et sans demander l'avis de quiconque, je fonce chez elle.
Là je vois la table mise. Deux couverts. Et une Nat en train de pleurer. Elle m'explique.

Nat était, sentimentalement, complètement perdue. Pour elle je n'étais plus "fiable", et je comprends fort bien sa réaction. Elle était allée au bal du 15 août, et avait fait la connaissance d’un mec. Qui lui a raconté des salades, et qui l'a bien embobinée. J'ai déjà parlé ici de l'énorme quantité d'amour qu'elle avait à donner, et à présent que Pompon était mort, que moi je n'étais plus en état de le recevoir, ça débordait de partout. D'autant que c'était moi qui lui avait fait réaliser que cet amour pouvait être aussi donné aux humains, pas qu'aux cochons d'inde.

Nat a cru ressentir un petit quelque chose dans son coeur, si bien que cela s'est terminé par une invitation  à dîner en tête à tête.
Il s’est pointé avec 1 heure de retard... accompagné d’une nana, qu’il a présenté à Natou comme sa “véritable fiancée ”.
Elle les a jetés avec pertes et fracas, mais à présent réalise.

Loin de lui en vouloir c'est ça aimer quelqu'un, ne chercher que son bonheur, quel qu'il soit) je la console comme je peux, et lui dis (vraiment sincère) : “tu vois, ça sert d’avoir un ami sur qui on peut compter ”. 

Car ça y est, j’avais intégré à nouveau l’idée de n’être plus que l’ami; le confident. Si bien sûr ce n'est plus déjà trop tard !

Alors elle me regarde en souriant. Je reconnais ce regard.

Elle me dit “imbécile” et se jette dans mes bras.

Elle m’aime toujours, elle m'a toujours aimé...
Il a fallu ce triste épisode pour qu'elle s'en rende vraiment compte.

Fin de notre - seule et unique - crise de couple. A partir de maintenant, on va s'aimer comme jamais. Malgré les bombardements de plus en plus ciblés que nous allons recevoir de tous les côtés.

Tant et si bien qu'elle est triste, quand elle part pour le voyage organisé qu'elle a prévu de longue date. Pour un peu, elle y renoncerait.

Cela fait 4 ans qu'on se connaît, 3 qu'on est ensemble, reste 6 pour le mariage, sans doute moins, notre fille ayant bien grandi et surtout réalisé que les ogres de Normandie ne sont que des ogres de carton.

                                                       
                                                    °°°°°°°


Vendredi 13 septembre. 13h50. Je suis au taf. Coup de téléphone, c'est mon épouse.
Des hurlements inarticulés. Elle vient de perdre sa mère...


(à suivre)

 

15:01 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : harcèlement, dépression

L'acharnement - 5

Guère de coms en ce moment, mais ce matin j'ai eu l'agréable surprise de voir que 130 visiteurs étaient venus hier. C'est mon record pour Hautetfort, et j'espère ne pas en rester là.

Aussi, cela m'encourage à poursuivre mon récit.

Le début d'année 96 commence mal, Nat et mon épouse étant désormais fâchées à mort depuis le 25 octobre précédent. Je devais choisir ce jour-là de passer l'après-midi avec l'une ou l'autre, c'est Nat que j'avais choisi sans hésiter.
Donc finis les repas à 4, et les interminables discussions dans l'escalier avec une Nat qui ne pouvait pas se résoudre à me quitter...

Mon épouse en revanche continue ses frasques. Un jour elle a un PV pour stationnement gênant, et ira au commissariat.... le déchirer devant les flics !
Mis au courant par une épouse joyeuse de son exploit, je vais m'expliquer avec les policiers. Elle, pendant ce temps, continue de les insulter !
En sueur, je bredouille des "c'est pas sa faute, c'est pas sa faute" et à ce moment-là l'inspecteur me dit qu'il comprend - montrant des yeux mon épouse hystérique - qu'il va recoller les morceaux du PV et nous les ré-envoyer par la poste.
Et me dit "bon courage" quand nous partons ! Il a tout compris...

En février, mes "deux nanas" partent en Normandie. Nouvelle cohabitation avec Nat, mais plus rien à voir avec 93 ou 94. Car même avec ma bien-aimée, cette fois j'ai du mal à quitter mon lit.

Et là elle me donnnera une superbe preuve d'amour : Malgré tout le monde aux aguets, tout le monde qui est - au moins dans l'immeuble - au courant de notre "ménage à trois", malgré le fait qu'elle passe aux yeux des bonnes gens pour une p..., Natou va dormir chez moi - dans mon lit donc - à chaque fois que je devrai bosser le lendemain.

Rien de sexuel désormais, rien que de la tendresse. Et des encouragements, à ne pas me laisser aller, à continuer, à essayer de croire que l'enfer va cesser, que le tortionnaire sera muté.

Non seulement il est loin d'être muté, mais à présent il en arrive jusqu'à appeler chez moi.
Il aurait reçu des plaintes de clients, et il m'attend de pied ferme dans son bureau le surlendemain.
C'est sa méthode, ça, qu'il appliquera joyeusement et systématiquement quand on partira en congé : "Faudra qu'on s'explique à ton retour". Vacances dans le doute, la terreur...

Mais il n'aura pas ce plaisir, car une ... varicelle va me clouer au lit !

La varicelle à 45 balais, je ne vous conseille pas. Fièvre et démangeaisons affreuses, et interdit de se gratter si on ne veut pas avoir une... cicatrice à vie !
Nat ne l'a pas eue non plus étant gamine, et n'hésite pourtant pas à passer prendre de mes nouvelles. Me dit également qu'elle n'en peut plus de bosser, dans l'état où elle se trouve (elle est autant sinon plus déprimée que moi, je le rappelle).
Du coup, au bout d'une seule semaine, flageolant, je reprends le boulot.
Va s'en suivre une conversation surréaliste (:

“ Alors, ça va mieux ?
- Pas trop ”
“ Ben alors fallait rester chez toi, on peut très bien y arriver sans toi, tu es loin d'être irremplaçable ! Tu sais, les cimetières sont remplis de gens irremplaçables ! ”

A présent, il ne se contente plus des réunions pour me massacrer, me traîner dans la boue.
"Tain, quand je pense que tu as 45 ans, et que tu n'es plus capable de rien... Mais c'est dans 15 ans la retraite, 15 ans ! Tu penses vraiment pouvoir arriver jusque-là ??? "
Le tout dit avec une voix tonnante, bien entendu.
J'y suis presque, maintenant, à la retraite, pauvre con !!!
Et les collègues me supplient de rester ! Tu le sais pas, ça ....

 

Au taf, c'est l'enfer. Mais heureusement, pour équilibrer un peu, à la maison aussi.
Notre fille a désormais honte d'un père qui renvoie une image de clodo, mon épouse continue crescendo ses dépenses extravagantes et...périlleuses pour notre budget, sans bien sûr me demander mon avis. En janvier, ce sera une tortue de Floride. En février une machine à laver - alors que l'autre marchait nickel  - et en mars, carrément une nouvelle voiture ! - même réflexion que pour la machine à laver.
Cette Nissan Micra, je ne la conduirai pour ainsi dire pas.


Piétiné par mon supérieur, nié par mon épouse, ignoré de ma fille, seule Nathalie aura le courage de me supporter, dans les deux sens du terme.

Mais, à son tour, elle va avoir bientôt une période de découragement.
Déjà elle m'avait surpris quand elle m'avait acheté un CD sans occasion spéciale : Pour que tu m'aimes encore de Céline Dion.
Ce ne sera que deux ans plus tard que je comprendrai pourquoi...


Je m'inventerai reine pour que tu me retiennes
Je me ferai nouvelle pour que le feu reprenne
Je deviendrai une autre après qui tu soupires
Ces jeux seront les nôtres, si tel est ton desir
Plus brillante plus belle pour une autre étincelle
Je me changerai en or pour que tu m'aimes encore...

(à suivre)

10/10/2010

L'acharnement - 4

Le sort s'acharne donc contre nous. Quelle sera la prochaine étape ?

A partir de ce jour, je vais vivre dans l'obsession. Celle de ne plus avoir de "chez moi", d'être en quelque sorte un SDF...
J'exagère, c'est l'effet de ma dépression, qui aggrave tout. J'exagère,  mais cet appartement, nous y vivions depuis huit ans et demie. Jamais au cours de ma vie d'homme je n'aurai vécu aussi longtemps dans un logement. Après un nombre effarant de déménagements (1972, 74, 75, 79, 80, 81, 84, 87) je pensais vraiment m'être fixé.
De ce jour, je mettrai un point d'honneur à ne plus dépendre d'un propriétaire.

Plus de maison, mais nouvel éloignement forcé d'avec Nat. Et cette fois, pas de miracle à espérer...

Vacances gâchées, bien évidemment, par cette obsession de maison. Obsession + somnolence, charmant pour mes deux nanas et notre ami de Lons le Saunier chez qui nous passions traditionnellement chaque été. Une fois de plus, le lit sera mon refuge, celui où j'oublierai tout. Y compris le canapé de notre ami, sur lequel je ferai des séjours prolongés. Il ne me reconnaîtra pas !

Et à mon retour, je donnerai les clés de la voiture à mon épouse : je ne sais plus conduire...
Pendant 5 ans je serai cloué au siège passager.
A une exception près, en septembre 1996, pour un cas de force majeure.

Dès la rentrée, mon épouse s'affole et est prête à accepter n'importe quoi à n'importe quel prix. Pour moi, un seul critère compte : Le plus près possible à la fois du boulot, de Nathalie, et du collège où va entrer ma fille.

Et on cherche, on cherche...
On se rend compte très vite que le marché locatif à Mende n'est plus ce qu'il était 9 ans auparavant, où l'on n'avait qu'à se baisser... L'effet autoroute a fait que cette ville à la montagne - le rêve concrétisé d'Alphonse Allais - attire de plus en plus de gens. On visitera ainsi près de 15 logements, mais aucun de répondra ni à  mes critères, ni à ceux de mon épouse.

Mais un matin, elle me passe un coup de fil : "Viens me rejoindre à la fontaine près du foirail, il y a peut-être quelque chose..."
Je me lève, je m'habille, je fonce. Mon épouse me montre une porte. "c'est là, j'attends les propriétaires".

Pour moi, plus la peine de visiter. Je prends, quoi que ce soit. Pile poil entre Nat et mon boulot, à moins de 500 m des deux. Et aussi, non négligeable, 200 m du collège où va entre notre fille !

Pourtant, ce logement sera pour moi synonyme des années noires. D'abord, il est sinistre. Grand, mais sinistre. Du marbre partout, des plafonds de 3 de haut (la maison est du XVIIème siècle) et le soleil n'y pénètrera jamais. Nous allons y rester pile deux ans.

Le déménagement se fera sans moi. Pas la force. Mon épouse tient à faire ça elle-même, avec des copains, sans prendre de déménageur.
Qu'elle assume si elle le veut, si elle tient vraiment - c'est le but - à me faire honte. Nous avons largement les moyens de nous payer un professionnel, moi je me sens parfaitement incapable de défaire 9 ans de ma vie accumulés.

Les médicaments commencent à me faire perdre la mémoire. Car je ne me rappelle plus où se trouvait Nat au cours de cet été-là :((

A partir de là, d'ailleurs, finies les dates précises. Certes j'ai encore des points de repère, mais de plus en plus flous. Ce seront les lettres de ma mère et les photos qui vont me faire reconstituer le puzzle de ces années-là.

Ce que je sais, c'est que cette année-là mon épouse ne travaillera pas. Donc, de plus en plus dur pour se voir Nat et moi. On y parvient, quand même, les jeudis après-midi, où mon épouse se rend à son club de couture. Ces jeudis après-midi se passeront au lit au début, puis progressivement la forêt remplacera le lit, la marche remplacera le flirt poussé.
Mais on continue à s'aimer, à voler le plus de baisers possibles, à voler des nuits d'hôtel Alésiennes  même si elles ne sont de moins en moins torrides.

A partir de cet automne 1995,  désormais je ne quitterai pas mon lit pendant les heures "autorisées".
Et mon épouse, à présent rassurée, sera de moins en moins présente. Vaut mieux d'ailleurs, car lorsqu'elle est à la maison, c'est crise d'hystérie sur crise d'hystérie.

Elle n'est jamais là, mais mène tout le monde à la baguette. Désormais c'est ELLE le chef, c'est elle qui décidera de tout (par exemple, dans un appart de plus de 100 mètres carrés, nous faire manger dans une cuisine de 1m50 sur 3...) qui s'occupera des papiers, et même des finances.
Qui m'imposera l'achat d'une nouvelle voiture.
C'est elle la patronne, et elle entend désormais bien le montrer.

Notre fille va passer directement de l'enfance à l'âge adulte, vu tout ce qu'elle aura à "gérer".
Je n'hésite pas à le dire, pendant ces deux années, entre la dépression de son père et l'hystérie - la folie grandissante - de sa mère, c'est elle qui "tiendra" la maison à elle toute seule. En plus de ses études qui ne s'annoncent pas des plus faciles.
Notre fille qui, pour faire face à tout ça, se couchera souvent à 2- 3 h du matin, avec un casque sur la tête imposé par l'orthodontiste. Je ne l'ai jamais dit à personne, mais cette image-là restera à jamais gravée dans ma mémoire. Pauvre gosse...

( à suivre )

14:53 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : dépression

L'acharnement - 3

La preuve qu'elle ne m'en voudra pas trop , c'est qu'on se téléphonera tous les soirs.
Et elle le fera de chez moi...! Haut-parleur ouvert, bien sûr et à partir de ce jour, mon épouse exigera que j'ouvre le haut-parleur lorsque je recevrai une communication téléphonique, même personnelle.

Depuis mon nouveau "traitement" désormais, quand je ne travaille pas, je dors jusqu'à 11heures - mon épouse sonne le réveil - et l'après-midi, sieste - limitée de 13h30 à 16h30 par la même épouse.
Mais 16h30, ce ne sera pas 16h32 :(

15 ans après, je n'ai toujours pas compris ces "limitations", ce non-respect de la maladie. Alors que moi j'ai toujours été à ses petits soins pour la sienne, de maladie !
Mais ce ne sera que le début en ce qui concerne l'attitude de mon épouse, qui sera complètement pourrie durant ma maladie.
Odieuse, même.

Pendant ce temps-là, au boulot nous arrive un nouveau logiciel, qui achève de me laisser en rade. Jusque-là j'avais essayé de ne pas trop me faire lâcher, mais là c'en était trop. Pour moi, les point.ini et les point.dot, ça me passait complètement au-dessus du crâne.
Je lâche tout !!!

Et les réunions se succèdent, toujours impitoyables. Nat est à chaque fois en larmes quand nous en ressortons, tandis que moi, je m'enfonce, je m'installe toujours un peu plus dans la dépression.
Le scénario est immuable : Ordre du jour, questions diverses. Dans l'ordre du jour, notre tortionnaire fait semblant de demander notre avis à tous les 4.
Systématiquement c'est deux contre deux, "Patrick et Nathalie" d'un côté, les deux autres collègues de l'autre. Et à chaque fois ce pauvre chef adoré devra trancher, la mort dans l'âme... En se ralliant systématiquement à l'avis des deux autres.
Et les "questions diverses", ce seront les règlements de comptes...
Tout cela au bureau, mais pas décompté en heures supplémentaires !

Mars. Mon épouse tente de passer le BAFA. Pour cela elle doit être une semaine en internat. Cette fois, pas question de me laisser notre fille, vu mon état. Mes parents la récupèrent avec joie.
Et Nat me demande une faveur : Qu'on aille passer une nuit en bord de mer. Le top serait une chambre sur la plage même.
Pas de problème, direction le Sud, direction Agde, le littoral le plus proche. Au Grau d'Agde nous dénichons un petit hôtel, pile sur la plage. Et c'est sur cette plage que je vais commettre LA gaffe. Due à ma maladie, oui, mais gaffe quand même.
Car Nat, en pleine dérive, veut avoir une preuve que je l'aime. Et pour elle la meilleure preuve serait que je l'embrasse en public. Que notre amour se voie devant tout le monde.
Je suis très surpris de sa demande, car jusqu'à présent elle ne l'avait pas trop souhaité, ce baiser en public. Il faut dire que nos baisers durent au minimum 3 à 4 minutes, et durant ces moments-là nous ne touchions plus terre. Dur ensuite d'y revenir, sur la Planète !

Et là donc, j'ai merdé. Oui, je l'ai embrassée fougueusement sur la plage, mais... j'ai voulu que ce soit la nuit. Pour que ce soit plus romantique, c'est vrai mais aussi pour être seuls, sans les autres, ces autres qui nous fusillaient du regard quand on "osait" marcher main dans la main.
Nat en aura beaucoup de peine, de ce semi-refus.

Pour moi c'est net, cette attitude, ce n'est pas moi, moi qui l'été d'avant à Briançon l'avais enlacée en pleine rue, dans une ville où j'étais connu comme le loup blanc !  Quelle dégringolade... De l'irresponsabilité à la couardise.

Autre dégringolade, c'est au volant. J'ai de plus en plus de mal à conduire, j'ai l'impression bizarre que je suis "tiré" vers le milieu de la route. Au départ je mets ça sur le compte de la direction (de la voiture lol), mais très vite je me rends compte que la voiture n'est pas en cause.

En mai nous allons en Bretagne, avec le Futuroscope prévu au retour. Je ne verrai rien, me traînant  lamentablement dans les stands en regardant ma montre, attendant la fermeture, attendant le retour à l'hôtel, attendant mon lit...

Un jour de juin, pendant ma sieste, mon épouse reçoit un coup de fil. C'est notre tortionnaire, qui ORDONNE que je vienne vider mon armoire au bureau, car elles doivent disparaître le soir même.
Ces armoires, fermées à clé, où Nat et moi avions accumulé nos trèsors, il nous faut les vider devant tout le monde, notamment mon épouse. Inutile de dire combien le monsieur jubilait en nous voyant faire...
Et c'est dans la précipitation que j'ai vidé mon armoire, et que j'ai rempli 3 cartons avec leur contenu.
Dont la disquette où Nat et moi avions écrit nos poèmes. Disquette que je vais chercher ensuite des années durant...

Juillet. Nat emménage dans son nouvel appart. Plus grand, plus clair, et surtout pas si loin que ça. Certes, ce sera beaucoup moins facile qu'avant de nous voir, mais nous restons à côté, c'est l'essentiel.

Enfin, nous croyons rester, car le jour où elle emménage, c'est nous qui recevons une lettre recommandée stipulant que notre bail n'est pas renouvelé.
Bref, qu'on est à notre tour fichus à la porte...

Vous avez dit "acharnement" ?

(à suivre)

14:02 Publié dans moi, psy | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : dépression, harcèlement

08/10/2010

Le début des médocs (septembre 1994)

Nous digérons peu à peu le choc du 8. Enfin nous croyons digérer.
Nous nous baladerons beaucoup, essentiellement en Auvergne et surtout le Cantal. 
Nous avons une prédilection pour les pédalos, grâce auxquels nous pourrons nous embrasser longuement à l'abri des regards. Du coup, nous connaissons tous les lacs de la région !

Pendant ce mois, nous avons bien sûr été danser. Le Déclic nous verra par deux fois. J'ai un tendre souvenir de la seconde fois : C'est la "série-tendresse", et nous dansons un slow, essayant de ne pas trop nous serrer. Passe alors "Il me dit que je suis belle", de Patricia Kaas. Version longue, près de 6 minutes.
Minutes pendant lesquelles nos défenses vont tomber, nos corps se laisser aller. Et nous entendrons distinctement une voix de femme - pas une Mendoise, une touriste, vu son accent - s'exclamer "mais regarde-moi ces deux-là, on dirait qu'ils font l'amour sur la piste..." !

Bref, en cette fin juillet, au vu des semaines passées, il semble évident que nous finirons notre vie ensemble... L'attente vaudra le coup.

Août est le mois des vacances. Pour mon épouse et moi un combiné Pays-Bas/Lille/Alsace/Lons le Saunier/Briançon, et pour elle... Briançon tout court. Dans un appartement qui m'appartient.

Mais ce mois d'août 1994 nous montrera à quel point nous sommes fragiles l'un sans l'autre. Nous nous téléphonerons presque chaque jour - d'une cabine, nous sommes en 1994 - pour nous remonter le moral.
Pour ma part, je me surprendrai en laissant ma fille à sa colo, comme les 4 années précédentes. Car aussitôt après l'avoir laissée, je vais pleurer sans interruption sur le trajet...

Ce jour-là marque pour moi très précisément le début de ma dépression. Laquelle, en ajoutant la maniaco qui allait suivre, ne durerait pas moins de 11 ans...

Dépression certes déclenchée par notre tortionnaire, mais le terrain était déjà bien préparé, par cet amour incroyable que je n'avais pas le droit de vivre encore. Par ces mensonges éhontés qu'il me fallait faire.

Septembre 1994, c'est le début des comprimés pour moi.
Car Nat, prétextant l'arrivée d'une vague cousine qu'elle n'avait jamais encore vue de sa vie, restera cloîtrée chez elle pendant 5 jours..
Du coup, crise de larmes, arrivée du toubib qui d'entrée me prescrit un traitement de cheval. Début de la spirale infernale...

Supplice inimaginable de la savoir juste en-dessous mais de ne pas pouvoir la voir.

En fait, elle aussi était entrée en dépression. En même temps que moi. Mais elle refusera les médocs, préférant le psy. Et cette fameuse semaine était en fait destinée à me cacher son état.

Deux ans qu'on se connaît, un an qu'on s'est déclarés, reste 8 pour la bague au doigt...

(à suivre)

11:50 Publié dans Merci | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : harcèlement, dépression