12/10/2010
Fillonneries
Les lycéens sont dans la rue !
Saine révolte d'une jeunesse qui ne veut pas hypothéquer son avenir à cause d'un roitelet campant sur ses positions.
Pour 68 ça avait été pareil, très vite nous nous étions joints aux étudiants (j'allais sur mes 18 ans) et ça a donné le mouvement que l'on sait.
Mais avez-vous entendu l'incommensurable connerie que Fillon a déclamée voici quelques heures ?
"Il est irresponsable de la part du parti socialiste de mettre des gosses de 15 ans dans la rue".
Oui je le mets en gros, car c'est vraiment gros.
Car cela voudrait dire :
1) que tous les lycéens sont des "gosses".
2) que ces gosses-lycéens ne sont pas capables d'avoir des idées personnelles, mais doivent prendre leurs ordres au...parti socialiste !
Ce genre de phrase bête au possible, proncée par quelqu'un que j'estime assez habile, montre bien un gouvernement aux abois, prêt à dire n'importe quoi dans l'affolement.
La porte est entrebaîllée, il faut l'enfoncer ! C'est le moment...
14:14 Publié dans actualité | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : sarkozy
11/10/2010
L'acharnement - 6
Toujours 1996. Vacances de Pâques avec la micra. J'ai quelques bribes de souvenirs, sans pouvoir parvenir à y mettre de date précise. Je sais que nous alllons à Lorient, près de ma famille, qui ne se privera pas de m'affubler de noms d'oiseaux. "Le zombi" pour le père de Jean-Yves - ce qui était tout à fait exact - "le crado" pour mon cousin/frère Jean-Yves lui-même, en évoquant mon odeur de sueur et mes cheveux gramouillés. Ca ça se reconnaît aussi à l'odeur, un dépressif...
Durant ces vacances, je me laisserai balloter au gré des vents, au gré des personnes. Je me contenterai de suivre, durant les rares moments où je ne serai pas à transpirer dans mon lit. Certes, il n'a pas fait beau, ce qui - côté lit - m'a simplifié la tâche !
Je me souviens d'une balade à Pleumeur-Bodou, près de Lannion, une balade qui m'aurait enchantée ne serait-ce que deux ans plus tôt, mais qui fut un véritable supplice...
Et je me souviens surtout d'une réflexion de Natou, pendant une des 3 conversations téléphoniques que nous allons avoir.
Là aussi, de plus en plus dur de m' "échapper" afin de trouver une cabine pour appeler ma bien-aimée.
Elle me lancera cette phrase : "c'est drôle, depuis que tu es parti je me sens mieux..."
C'est sûr, j'étais en train de lui bouffer les quelques forces supplémentaires qu'elle avait en plus, je l'entraînais vers le bas. Surtout, étant une personne exceptionnelle, elle ne comprenait pas que face au Mal, à la dépression, je ne réagisse pas comme elle.
Mais j'étais loin d'avoir atteint son degré à ce niveau !
Et là va commencer une période de 5 mois où elle va s'éloigner de moi.
Notre tortionnaire le voit, et change alors la règle du jeu pour les emplois du temps. Désormais "dans un souci d'assouplissement", nous pourrons chacun choisir les jours où nous voudrons bosser, et avec qui nous voulons bosser. Ce "rite" se situera avant chaque réunion mensuelle, et il ne pourra cacher sa joie quand Nat fera exprès de mettre son nom à côté d'un autre collègue...
Puis elle va prendre ses congés, à la suite. Pour des destinations lointaines, comme la Réunion, Venise, les Lacs Italiens...
A partir de là, je me laisse couler.
A pic.
Je vais passer à côté de beaucoup de choses, dont deux cérémonies familiales importantes.
Les 60 ans de mariage de mes parents, d'abord. Je ne m'en souviens que grâce à la photo où l'on me voit, effectivement, dans un état de décomposition avancée.
Et la communion solennelle de ma fille d'autre part, que j'ai "survolée".
J'espère qu'elle m' a pardonné aussi mon peu d'enthousiaste devant son gala annuel de danse classique cette année-là (ma fille, à 12 ans, était danseuse classique, de haut niveau) ...
Et puis des trucs que j'ai découverts plus tard, comme par exemple que mon épouse avait voulu devenir nounou, et qu'elle avait gardé un gamin pendant trois semaines. Je devais être dans mon lit pendant ce temps, lit que je ne quitterai plus désormais que pour m'asseoir dans le canapé regarder la chaine que mon épouse a programmé .
"Je passe à la télé" "questions pour un champion" et "qui est qui" seront ma grande trilogie, avant le salvateur "Bonne nuit les petits" !
J'interromps de moi-même mes émissions de radio hebdomadaires, me sentant incapable d'une part de faire les 900m à pied jusqu'au studio, et d'autre part de faire une émission correcte. Car si je n'arrive plus à conduire depuis un an, je n'arrive plus non plus à écrire et je n'arrive plus non plus à parler devant un micro. Il est loin le Patrick qui, 12 ans auparavant, faisait vibrer les foules...
Ma démarche est à présent celle d'un drogué, et - je ne mens pas - j'éviterai de passer par une certaine place pour aller au boulot, car la bande de gamins qui y joue me lancera des pierres en m'appelant "Vichnou" ...
Pire encore ! Jean-Yves débarque début juillet, pour une semaine. Et en plus le hasard veut que j'aie cette semaine-là en congés ! Mon cousin/frère chez moi, ça n'était pas arrivé depuis des années.
23 très exactement, au temps où j'étais la star de mon département !
Là encore, peu de souvenirs, sinon un truc que mon cousin essaiera de faire fonctionner, mais sans succès, car pas encore prévu pour la Lozère : le téléphone portable...
Je revois aussi ma fille en vacances, avec son passe-temps favori : balancer ses copines dans la fontaine en bas de l'immeuble et s'y faire balancer aussi... J'imagine que l'été a dû être chaud. Moi je n'en ai aucun souvenir..
Puis vient le moment des vacances. Il est prévu la Normandie puis l'Alsace, en finissant comme tous les ans à Lons le Saunier.
La fin de cet été 1996 va être l'horreur absolue pour mon épouse.
D'abord, dès qu'on arrive en Normandie, on lui annonce brutalement la mort de sa tante, un femme qu'elle a toujours adoré. Le séjour sera réduit aux funérailles. Sympa pour elle !
Puis direction l'Alsace, où l'on a réservé un gîte à Eguisheim. C'est sans doute un des plus beaux villages d'Alsace, et habiter en plein milieu est un privilège. En plus il fera super-beau pendant ces 8 jours.
Où, en dehors de 3 après-midi, je... resterai presque en permanence à transpirer dans mon lit ! Deux lits jumeaux de 90 dans la chambre, heureusement pour mon épouse car les draps seront trempés tous les soirs !
J'ai aussi le vague souvenir d'avoir été à Europa-Park, le Disneyland Allemand. Là encore, au lieu de m'amuser, je subissais, en essayant de "faire semblant" pour ma fille, ma fille qui méritait bien de s'éclater..
Puis Lons le Saunier où le canapé de notre vieil ami m'a encore plus vu que l'année d'avant :(
Mais cette année, une chose se passe. J'ai la hantise de retourner à Mende.
Qu'est-ce qui m'attend là-bas ? Un appartement sinistre, un chef de plus en plus redoutable, et une Nathalie qui - c'est ce que je pense sur le moment - ne m'aime plus. Non merci...
Et de la même manière que ma fille disait l'année d'avant "non, je ne veux pas aller à la colo", là c'est "non je ne veux pas retourner en Lozère.."
Deux surprises de taille m'attendent, au retour.
D'abord, dans ma boîte aux lettres, un billet doux du tortionnaire me disant que j'avais commis une faute et qu'il fallait que je me présente le lendemain à son bureau :(
Et au répondeur, Nathalie.
Une Nat affolée :
"Viens vite, je t'en supplie !!!"
Appel daté de moins d'une heure, et sans demander l'avis de quiconque, je fonce chez elle.
Là je vois la table mise. Deux couverts. Et une Nat en train de pleurer. Elle m'explique.
Nat était, sentimentalement, complètement perdue. Pour elle je n'étais plus "fiable", et je comprends fort bien sa réaction. Elle était allée au bal du 15 août, et avait fait la connaissance d’un mec. Qui lui a raconté des salades, et qui l'a bien embobinée. J'ai déjà parlé ici de l'énorme quantité d'amour qu'elle avait à donner, et à présent que Pompon était mort, que moi je n'étais plus en état de le recevoir, ça débordait de partout. D'autant que c'était moi qui lui avait fait réaliser que cet amour pouvait être aussi donné aux humains, pas qu'aux cochons d'inde.
Nat a cru ressentir un petit quelque chose dans son coeur, si bien que cela s'est terminé par une invitation à dîner en tête à tête.
Il s’est pointé avec 1 heure de retard... accompagné d’une nana, qu’il a présenté à Natou comme sa “véritable fiancée ”.
Elle les a jetés avec pertes et fracas, mais à présent réalise.
Loin de lui en vouloir c'est ça aimer quelqu'un, ne chercher que son bonheur, quel qu'il soit) je la console comme je peux, et lui dis (vraiment sincère) : “tu vois, ça sert d’avoir un ami sur qui on peut compter ”.
Car ça y est, j’avais intégré à nouveau l’idée de n’être plus que l’ami; le confident. Si bien sûr ce n'est plus déjà trop tard !
Alors elle me regarde en souriant. Je reconnais ce regard.
Elle me dit “imbécile” et se jette dans mes bras.
Elle m’aime toujours, elle m'a toujours aimé...
Il a fallu ce triste épisode pour qu'elle s'en rende vraiment compte.
Fin de notre - seule et unique - crise de couple. A partir de maintenant, on va s'aimer comme jamais. Malgré les bombardements de plus en plus ciblés que nous allons recevoir de tous les côtés.
Tant et si bien qu'elle est triste, quand elle part pour le voyage organisé qu'elle a prévu de longue date. Pour un peu, elle y renoncerait.
Cela fait 4 ans qu'on se connaît, 3 qu'on est ensemble, reste 6 pour le mariage, sans doute moins, notre fille ayant bien grandi et surtout réalisé que les ogres de Normandie ne sont que des ogres de carton.
°°°°°°°
Vendredi 13 septembre. 13h50. Je suis au taf. Coup de téléphone, c'est mon épouse.
Des hurlements inarticulés. Elle vient de perdre sa mère...
(à suivre)
15:01 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : harcèlement, dépression
L'acharnement - 5
Guère de coms en ce moment, mais ce matin j'ai eu l'agréable surprise de voir que 130 visiteurs étaient venus hier. C'est mon record pour Hautetfort, et j'espère ne pas en rester là.
Aussi, cela m'encourage à poursuivre mon récit.
Le début d'année 96 commence mal, Nat et mon épouse étant désormais fâchées à mort depuis le 25 octobre précédent. Je devais choisir ce jour-là de passer l'après-midi avec l'une ou l'autre, c'est Nat que j'avais choisi sans hésiter.
Donc finis les repas à 4, et les interminables discussions dans l'escalier avec une Nat qui ne pouvait pas se résoudre à me quitter...
Mon épouse en revanche continue ses frasques. Un jour elle a un PV pour stationnement gênant, et ira au commissariat.... le déchirer devant les flics !
Mis au courant par une épouse joyeuse de son exploit, je vais m'expliquer avec les policiers. Elle, pendant ce temps, continue de les insulter !
En sueur, je bredouille des "c'est pas sa faute, c'est pas sa faute" et à ce moment-là l'inspecteur me dit qu'il comprend - montrant des yeux mon épouse hystérique - qu'il va recoller les morceaux du PV et nous les ré-envoyer par la poste.
Et me dit "bon courage" quand nous partons ! Il a tout compris...
En février, mes "deux nanas" partent en Normandie. Nouvelle cohabitation avec Nat, mais plus rien à voir avec 93 ou 94. Car même avec ma bien-aimée, cette fois j'ai du mal à quitter mon lit.
Et là elle me donnnera une superbe preuve d'amour : Malgré tout le monde aux aguets, tout le monde qui est - au moins dans l'immeuble - au courant de notre "ménage à trois", malgré le fait qu'elle passe aux yeux des bonnes gens pour une p..., Natou va dormir chez moi - dans mon lit donc - à chaque fois que je devrai bosser le lendemain.
Rien de sexuel désormais, rien que de la tendresse. Et des encouragements, à ne pas me laisser aller, à continuer, à essayer de croire que l'enfer va cesser, que le tortionnaire sera muté.
Non seulement il est loin d'être muté, mais à présent il en arrive jusqu'à appeler chez moi.
Il aurait reçu des plaintes de clients, et il m'attend de pied ferme dans son bureau le surlendemain.
C'est sa méthode, ça, qu'il appliquera joyeusement et systématiquement quand on partira en congé : "Faudra qu'on s'explique à ton retour". Vacances dans le doute, la terreur...
Mais il n'aura pas ce plaisir, car une ... varicelle va me clouer au lit !
La varicelle à 45 balais, je ne vous conseille pas. Fièvre et démangeaisons affreuses, et interdit de se gratter si on ne veut pas avoir une... cicatrice à vie !
Nat ne l'a pas eue non plus étant gamine, et n'hésite pourtant pas à passer prendre de mes nouvelles. Me dit également qu'elle n'en peut plus de bosser, dans l'état où elle se trouve (elle est autant sinon plus déprimée que moi, je le rappelle).
Du coup, au bout d'une seule semaine, flageolant, je reprends le boulot.
Va s'en suivre une conversation surréaliste (:
“ Alors, ça va mieux ?
- Pas trop ”
“ Ben alors fallait rester chez toi, on peut très bien y arriver sans toi, tu es loin d'être irremplaçable ! Tu sais, les cimetières sont remplis de gens irremplaçables ! ”
A présent, il ne se contente plus des réunions pour me massacrer, me traîner dans la boue.
"Tain, quand je pense que tu as 45 ans, et que tu n'es plus capable de rien... Mais c'est dans 15 ans la retraite, 15 ans ! Tu penses vraiment pouvoir arriver jusque-là ??? "
Le tout dit avec une voix tonnante, bien entendu.
J'y suis presque, maintenant, à la retraite, pauvre con !!!
Et les collègues me supplient de rester ! Tu le sais pas, ça ....
Au taf, c'est l'enfer. Mais heureusement, pour équilibrer un peu, à la maison aussi.
Notre fille a désormais honte d'un père qui renvoie une image de clodo, mon épouse continue crescendo ses dépenses extravagantes et...périlleuses pour notre budget, sans bien sûr me demander mon avis. En janvier, ce sera une tortue de Floride. En février une machine à laver - alors que l'autre marchait nickel - et en mars, carrément une nouvelle voiture ! - même réflexion que pour la machine à laver.
Cette Nissan Micra, je ne la conduirai pour ainsi dire pas.
Piétiné par mon supérieur, nié par mon épouse, ignoré de ma fille, seule Nathalie aura le courage de me supporter, dans les deux sens du terme.
Mais, à son tour, elle va avoir bientôt une période de découragement.
Déjà elle m'avait surpris quand elle m'avait acheté un CD sans occasion spéciale : Pour que tu m'aimes encore de Céline Dion.
Ce ne sera que deux ans plus tard que je comprendrai pourquoi...
(à suivre)
13:52 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : dépression, persécution, hystérie
10/10/2010
L'acharnement - 4
Le sort s'acharne donc contre nous. Quelle sera la prochaine étape ?
A partir de ce jour, je vais vivre dans l'obsession. Celle de ne plus avoir de "chez moi", d'être en quelque sorte un SDF...
J'exagère, c'est l'effet de ma dépression, qui aggrave tout. J'exagère, mais cet appartement, nous y vivions depuis huit ans et demie. Jamais au cours de ma vie d'homme je n'aurai vécu aussi longtemps dans un logement. Après un nombre effarant de déménagements (1972, 74, 75, 79, 80, 81, 84, 87) je pensais vraiment m'être fixé.
De ce jour, je mettrai un point d'honneur à ne plus dépendre d'un propriétaire.
Plus de maison, mais nouvel éloignement forcé d'avec Nat. Et cette fois, pas de miracle à espérer...
Vacances gâchées, bien évidemment, par cette obsession de maison. Obsession + somnolence, charmant pour mes deux nanas et notre ami de Lons le Saunier chez qui nous passions traditionnellement chaque été. Une fois de plus, le lit sera mon refuge, celui où j'oublierai tout. Y compris le canapé de notre ami, sur lequel je ferai des séjours prolongés. Il ne me reconnaîtra pas !
Et à mon retour, je donnerai les clés de la voiture à mon épouse : je ne sais plus conduire...
Pendant 5 ans je serai cloué au siège passager.
A une exception près, en septembre 1996, pour un cas de force majeure.
Dès la rentrée, mon épouse s'affole et est prête à accepter n'importe quoi à n'importe quel prix. Pour moi, un seul critère compte : Le plus près possible à la fois du boulot, de Nathalie, et du collège où va entrer ma fille.
Et on cherche, on cherche...
On se rend compte très vite que le marché locatif à Mende n'est plus ce qu'il était 9 ans auparavant, où l'on n'avait qu'à se baisser... L'effet autoroute a fait que cette ville à la montagne - le rêve concrétisé d'Alphonse Allais - attire de plus en plus de gens. On visitera ainsi près de 15 logements, mais aucun de répondra ni à mes critères, ni à ceux de mon épouse.
Mais un matin, elle me passe un coup de fil : "Viens me rejoindre à la fontaine près du foirail, il y a peut-être quelque chose..."
Je me lève, je m'habille, je fonce. Mon épouse me montre une porte. "c'est là, j'attends les propriétaires".
Pour moi, plus la peine de visiter. Je prends, quoi que ce soit. Pile poil entre Nat et mon boulot, à moins de 500 m des deux. Et aussi, non négligeable, 200 m du collège où va entre notre fille !
Pourtant, ce logement sera pour moi synonyme des années noires. D'abord, il est sinistre. Grand, mais sinistre. Du marbre partout, des plafonds de 3 de haut (la maison est du XVIIème siècle) et le soleil n'y pénètrera jamais. Nous allons y rester pile deux ans.
Le déménagement se fera sans moi. Pas la force. Mon épouse tient à faire ça elle-même, avec des copains, sans prendre de déménageur.
Qu'elle assume si elle le veut, si elle tient vraiment - c'est le but - à me faire honte. Nous avons largement les moyens de nous payer un professionnel, moi je me sens parfaitement incapable de défaire 9 ans de ma vie accumulés.
Les médicaments commencent à me faire perdre la mémoire. Car je ne me rappelle plus où se trouvait Nat au cours de cet été-là :((
A partir de là, d'ailleurs, finies les dates précises. Certes j'ai encore des points de repère, mais de plus en plus flous. Ce seront les lettres de ma mère et les photos qui vont me faire reconstituer le puzzle de ces années-là.
Ce que je sais, c'est que cette année-là mon épouse ne travaillera pas. Donc, de plus en plus dur pour se voir Nat et moi. On y parvient, quand même, les jeudis après-midi, où mon épouse se rend à son club de couture. Ces jeudis après-midi se passeront au lit au début, puis progressivement la forêt remplacera le lit, la marche remplacera le flirt poussé.
Mais on continue à s'aimer, à voler le plus de baisers possibles, à voler des nuits d'hôtel Alésiennes même si elles ne sont de moins en moins torrides.
A partir de cet automne 1995, désormais je ne quitterai pas mon lit pendant les heures "autorisées".
Et mon épouse, à présent rassurée, sera de moins en moins présente. Vaut mieux d'ailleurs, car lorsqu'elle est à la maison, c'est crise d'hystérie sur crise d'hystérie.
Elle n'est jamais là, mais mène tout le monde à la baguette. Désormais c'est ELLE le chef, c'est elle qui décidera de tout (par exemple, dans un appart de plus de 100 mètres carrés, nous faire manger dans une cuisine de 1m50 sur 3...) qui s'occupera des papiers, et même des finances.
Qui m'imposera l'achat d'une nouvelle voiture.
C'est elle la patronne, et elle entend désormais bien le montrer.
Notre fille va passer directement de l'enfance à l'âge adulte, vu tout ce qu'elle aura à "gérer".
Je n'hésite pas à le dire, pendant ces deux années, entre la dépression de son père et l'hystérie - la folie grandissante - de sa mère, c'est elle qui "tiendra" la maison à elle toute seule. En plus de ses études qui ne s'annoncent pas des plus faciles.
Notre fille qui, pour faire face à tout ça, se couchera souvent à 2- 3 h du matin, avec un casque sur la tête imposé par l'orthodontiste. Je ne l'ai jamais dit à personne, mais cette image-là restera à jamais gravée dans ma mémoire. Pauvre gosse...
( à suivre )
14:53 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : dépression
L'acharnement - 3
La preuve qu'elle ne m'en voudra pas trop , c'est qu'on se téléphonera tous les soirs.
Et elle le fera de chez moi...! Haut-parleur ouvert, bien sûr et à partir de ce jour, mon épouse exigera que j'ouvre le haut-parleur lorsque je recevrai une communication téléphonique, même personnelle.
Depuis mon nouveau "traitement" désormais, quand je ne travaille pas, je dors jusqu'à 11heures - mon épouse sonne le réveil - et l'après-midi, sieste - limitée de 13h30 à 16h30 par la même épouse.
Mais 16h30, ce ne sera pas 16h32 :(
15 ans après, je n'ai toujours pas compris ces "limitations", ce non-respect de la maladie. Alors que moi j'ai toujours été à ses petits soins pour la sienne, de maladie !
Mais ce ne sera que le début en ce qui concerne l'attitude de mon épouse, qui sera complètement pourrie durant ma maladie.
Odieuse, même.
Pendant ce temps-là, au boulot nous arrive un nouveau logiciel, qui achève de me laisser en rade. Jusque-là j'avais essayé de ne pas trop me faire lâcher, mais là c'en était trop. Pour moi, les point.ini et les point.dot, ça me passait complètement au-dessus du crâne.
Je lâche tout !!!
Et les réunions se succèdent, toujours impitoyables. Nat est à chaque fois en larmes quand nous en ressortons, tandis que moi, je m'enfonce, je m'installe toujours un peu plus dans la dépression.
Le scénario est immuable : Ordre du jour, questions diverses. Dans l'ordre du jour, notre tortionnaire fait semblant de demander notre avis à tous les 4.
Systématiquement c'est deux contre deux, "Patrick et Nathalie" d'un côté, les deux autres collègues de l'autre. Et à chaque fois ce pauvre chef adoré devra trancher, la mort dans l'âme... En se ralliant systématiquement à l'avis des deux autres.
Et les "questions diverses", ce seront les règlements de comptes...
Tout cela au bureau, mais pas décompté en heures supplémentaires !
Mars. Mon épouse tente de passer le BAFA. Pour cela elle doit être une semaine en internat. Cette fois, pas question de me laisser notre fille, vu mon état. Mes parents la récupèrent avec joie.
Et Nat me demande une faveur : Qu'on aille passer une nuit en bord de mer. Le top serait une chambre sur la plage même.
Pas de problème, direction le Sud, direction Agde, le littoral le plus proche. Au Grau d'Agde nous dénichons un petit hôtel, pile sur la plage. Et c'est sur cette plage que je vais commettre LA gaffe. Due à ma maladie, oui, mais gaffe quand même.
Car Nat, en pleine dérive, veut avoir une preuve que je l'aime. Et pour elle la meilleure preuve serait que je l'embrasse en public. Que notre amour se voie devant tout le monde.
Je suis très surpris de sa demande, car jusqu'à présent elle ne l'avait pas trop souhaité, ce baiser en public. Il faut dire que nos baisers durent au minimum 3 à 4 minutes, et durant ces moments-là nous ne touchions plus terre. Dur ensuite d'y revenir, sur la Planète !
Et là donc, j'ai merdé. Oui, je l'ai embrassée fougueusement sur la plage, mais... j'ai voulu que ce soit la nuit. Pour que ce soit plus romantique, c'est vrai mais aussi pour être seuls, sans les autres, ces autres qui nous fusillaient du regard quand on "osait" marcher main dans la main.
Nat en aura beaucoup de peine, de ce semi-refus.
Pour moi c'est net, cette attitude, ce n'est pas moi, moi qui l'été d'avant à Briançon l'avais enlacée en pleine rue, dans une ville où j'étais connu comme le loup blanc ! Quelle dégringolade... De l'irresponsabilité à la couardise.
Autre dégringolade, c'est au volant. J'ai de plus en plus de mal à conduire, j'ai l'impression bizarre que je suis "tiré" vers le milieu de la route. Au départ je mets ça sur le compte de la direction (de la voiture lol), mais très vite je me rends compte que la voiture n'est pas en cause.
En mai nous allons en Bretagne, avec le Futuroscope prévu au retour. Je ne verrai rien, me traînant lamentablement dans les stands en regardant ma montre, attendant la fermeture, attendant le retour à l'hôtel, attendant mon lit...
Un jour de juin, pendant ma sieste, mon épouse reçoit un coup de fil. C'est notre tortionnaire, qui ORDONNE que je vienne vider mon armoire au bureau, car elles doivent disparaître le soir même.
Ces armoires, fermées à clé, où Nat et moi avions accumulé nos trèsors, il nous faut les vider devant tout le monde, notamment mon épouse. Inutile de dire combien le monsieur jubilait en nous voyant faire...
Et c'est dans la précipitation que j'ai vidé mon armoire, et que j'ai rempli 3 cartons avec leur contenu.
Dont la disquette où Nat et moi avions écrit nos poèmes. Disquette que je vais chercher ensuite des années durant...
Juillet. Nat emménage dans son nouvel appart. Plus grand, plus clair, et surtout pas si loin que ça. Certes, ce sera beaucoup moins facile qu'avant de nous voir, mais nous restons à côté, c'est l'essentiel.
Enfin, nous croyons rester, car le jour où elle emménage, c'est nous qui recevons une lettre recommandée stipulant que notre bail n'est pas renouvelé.
Bref, qu'on est à notre tour fichus à la porte...
Vous avez dit "acharnement" ?
(à suivre)
14:02 Publié dans moi, psy | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : dépression, harcèlement
09/10/2010
L'acharnement - 2
Christel se demandait pourquoi ma chère et tendre nous faciliatait les choses. Comme je lui ai répondu, ça reste pour moi un mystère...
Et rebelote début décembre, elle repart en Normandie pour 10 jours. Sans notre fille, qui doit aller à l'école.
Et pendant ces 10 jours, nous serons tous les deux intégralement pris en charge par Nathalie.
Laquelle me semble bien plus résistante que moi.
Une anecdote : Tous les trois sommes allés voir le Roi Lion au ciné. Nous sommes ensuite revenus chez nous, moi ne desserrant pas les dents. J'envoie ma fille prendre un bain "en haut", alors que moi je reste avec Nat. Pour me jeter dans ses bras, et ... pleurer, pleurer, sans interruption pendant 20 bonnes minutes !
C'est depuis cette date que je suis incapable - encore aujourd'hui - de regarder un film au cinéma ou à la télé, sans me transformer en fontaine.
Décembre 1994 va aussi me faire découvrir quelque chose d'incroyable, de formidable dans le sens littéral du terme, c'est à dire proprement terrifiant.
Ma dépression va prendre une forme très aiguë.
Ca a duré dix jours, dont le réveillon chez mes parents.
Le matin je me réveillais complètement paniqué. Affolé. Je tremblais, je ne voulais pas sortir du lit. Je n’avais qu’une hâte: vite le soir pour que je puisse me recoucher. Cela se passait par «crises». Tout d’un coup je la sentais arriver, cette crise et j’étais alors obligé de m’allonger, d'attendre que ça passe. Non, impossible vraiment à décrire, ça dépasse l’imagination. Je ne savais pas que la nature avait prévu de tels supplices pour l'être humain.
J’ai dû prendre une semaine de congé-maladie. Ce sera la seule durant mes 10 années de dépression/maniaco-dépression, à l'exception de 4 semaines en février/mars 2003, mais là, ça sera vraiment "obligatoire" pour moi.
La réponse est simple, évidente même : Tout simplement parce qu'au boulot, pendant que j'étais malade, mon tortionnaire s'en donnait à coeur joie contre une Nathalie de plus en plus affaiblie. Allant même jusqu'à lui laisser des messages pour moi, style "si Patrick prolonge son arrêt, je me verrai dans l'obligation de le confiner dans un bureau"... Le placard, quoi.
Et là j'ai été voir un psy, entre deux crises. Un psy qui était complètement à côté de la plaque, se bornant à me bourrer de médicaments.
Dans une certaine mesure ils ont été efficaces puisque ils ont réussi à calmer mes crises, à atténuer ma dépression. Mais bonjour les effets secondaires ! Envie de dormir permanente, transpiration abondante, regard hagard, démarche hésitante... Et surtout, surtout, diminution des facultés intellectuelles.
C'est à dire que peu à peu, je vais décrocher de mon boulot, ne pourrai plus "suivre".
Ce que ne manquera pas de souligner notre tortionnaire dans ses réunions mensuelles :
"On pourrait effectivement accomplir telle ou telle tâche, mais malheureusement tout le monde n'a pas les mêmes facultés dans l'équipe..."
Et de bien me regarder, de ses yeux noirs ébène.
Néanmoins, Nat et moi continuons de nous aimer. Peut-être même plus intensément.
Invité pour le réveillon du nouvel-an, mon meilleur ami nous dira que notre amour n'était pas discret, vu la façon dont nous nous parlons, dont nous nous regardons...
Notre amour se voyait encore de l'extérieur, il n'était pas mort...
Même si en tant que collègues nous étions souvent séparés, en tant que voisins nous pouvions nous voir à notre guise.
Hélas, l'année 1995 va nous enlever ce dernier privilège.
Début janvier, Nat reçoit une lettre recommandée stipulant qu'elle était mise à la porte de son appart à la fin de son bail, en septembre. Alors que sa proprio lui avait juré mordicus qu'elle était là pour longtemps...
Interdit de congés de maladie, il me reste les congés annuels pour essayer de me retaper. Mon cousin/frère Jean-Yves accepte que je vienne passer 10 jours chez lui, en Bretagne.
Mais la veille de mon départ, Pompon (le cochon d'Inde de Nat, l'être sur qui elle a toujours reporté tout son - immense - trop plein d'amour) tombe malade.
Le véto consulté ne veut pas se prononcer, et moi je ne sais plus quoi faire. Partir malgré tout, ou rester auprès d'elle, en cas de "pépin" ?
Je choisis de partir, tandis que Pompon choisira de mourir.
Là encore, un grand coup de chapeau à mon épouse, car c'est elle qui soutiendra Nat pendant cette terrible épreuve.
Mais pourquoi ???????
Nat au départ elle m'en voudra, mais peu à peu elle comprendra, et me pardonnera.
C'est pendant ces 10 jours épiques, où je dormirai dans le salon au milieu des cris des enfants, que mon cousin/frère me fera partager une de ses dernières découvertes : internet.
(à suivre)
14:48 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : harcèlement
Chanson pour Christel (et ceux qui sont concernés)
12:13 Publié dans Cica-chansons | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : harcèlement
08/10/2010
L'acharnement - 1
Malgré cette maladie qui pose ses premiers jalons, malgré, pour moi, les effets des médicaments - envie de dormir permanente, entre autres -, malgré cela nous continuons à y croire. D'autant que cela nous sera facilité par l'embauche en CES de mon épouse. Plus besoin d'échafauder des plans abracadabrantesques pour nous voir.
Surtout que notre vie en couple durant ce mois de juillet nous a laissé un tel souvenir que nous brûlons d'envie de recommencer...
La plénitude de s'endormir à deux, enlacés comme pas possible, et surtout de se réveiller à côté de l'être aimé, se demandant si l'on est réellement réveillés, où si cela fait partie de la "vraie" vie.
Ces nuits-là nous manqueront tellement que l'on viendra à imaginer un stratagème pour les revivre.
Pour cela nous allons profiter de mes nombreux déplacements au siège Régional de la boîte, c'est à dire Marseille. Je l'ai dit - et mon épouse le sait - que, tenant à mes os, je ne tiens pas du tout à aller en voiture dans la cité phocéenne et que du coup je prends le train. Pour l'aller pas de souci, partant à 18h, j'arrive à St Charles à 23h34. Mais pour que je puisse rentrer le lendemain soir à Mende, il faudrait que je sois quitte à 16h. Ce qui n'est jamais le cas. Force m'est de coucher une seconde nuit à Marseille.
Cela, je le fais régulièrement depuis 1987, et si mon épouse a eu quelques soupçons au début, assez vite elle a admis que je ne pouvais faire autrement.
Ces déplacements ont lieu environ 4 fois par an : Réunions d'information, réunion syndicales, stages même.
Et c'est ainsi que la seconde nuit se passera désormais avec Nat, dans un hôtel d'Alès - 1 heure et demie en voiture - , un hôtel différent à chaque fois. Je pense qu'en-dehors des hôtels de passe, nous avons dû tous les faire !
Non, nous ne sommes pas décidés à baisser les bras, un amour comme le nôtre ne mérite pas qu'on les baisse au premier coup de vent - quoique là on en arrive au stade du Grand Frais - et du coup, je me réduis de moitié ma ration d'anxyolitiques.
Et pour bien marquer le coup, elle sera avec nous chez mes parents le week-end de l'anniversaire de ma fille. Présentation "officielle" de Nathalie à mes parents...
Fiasco total. Miracle, mon père, lui, le sauvage, le misanthrope, a la même réaction que l’an passé à la communion. Il est sous le charme. Et fait tout son possible pour qu’elle soit bien.
Mais ma mère, elle, ne la saque pas. Et elle lui envoie des vannes dès qu’elle peut. Le repas du soir se passe très mal, celui du lendemain midi encore plus mal. Pourtant Natou sera parfaite. Très polie, très discrète...
En fait je saurai pourquoi bien plus tard, par un cousin :
De deux choses l'une : Soit cet amour est à sens unique, et alors elle déteste légitiment celle qui ferait souffrir son fils.
Soit nous nous aimons pour de bon, et alors ça signifierait divorce, et leur petite-fille en Normandie, qu'ils ne reverraient jamais. En 1994, mes parents ont 82 ans...
Nat souffrira énormément de ce rejet de ma mère. Comme moi je serai mal à l'aise face au rejet de la sienne.
J'aurais dû retenir la leçon de mon premier mariage : quand les parents sont contre un couple, celui-là ne va jamais bien loin...
Octobre arrive. Nat et moi commençons à redresser la tête. Nous profitons au maximum des occasions qui nous sont données d'être ensemble. Nous allons très souvent au cinéma, nos mains l'une dans l'autre pendant près de deux heures...
Mais également, nous avons de plus en plus de scrupules vis à vis de mon épouse. Laquelle - je ne saurai jamais pourquoi - multiplie pourtant les occasions de nous voir en dehors du boulot. Invitations à dîner, promenades les après-midi... Elle le fera jusqu'au bout !
Je sais mon épouse intelligente et intuitive, et je me demande encore le pourquoi de cette attitude...
Par exemple, c'est devenu un rite, après chaque soirée chez nous, Nat insiste pour que je la raccompagne chez elle. A l'étage du dessous !
Et le "raccompagnement" durera à chaque fois près d'une heure !!
Et jamais mon épouse ne me l'interdira ce "raccompagnement" qui fut parfois torride.
Novembre. Ma feuille de notation. "D'évaluation", litote-t'on maintenant.
Je m'attends au pire. En fait je serai très surpris :
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Cet agent est passionné par son métier, dont il maîtrise tous les aspects avec brio. A su cumuler les tâches d’exploitation à celles de directeur départemental de novembre 93 à février 94. . Excellent agent..
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Mais en revanche Nathalie est saquée.
Pas mal joué, pour semer la zizanie dans le couple : Il ne pouvait déjuger ses prédécesseurs, qui m'encensaient depuis des années, mais qui restaient réservés vis à vis de ma bien-aimée.
Elle ne m'en veut pas, au contraire, mais elle est peinée, immensément peinée de se voir si mal jugée. Et du coup commence à perdre la confiance en elle qu'elle avait réussi, sur le plan professionnel, à accumuler depuis deux ans.
Très dure pour elle, cette période. Rejetée par ma mère, rejetée par le travail...
Heureusement, il lui reste notre amour, qui lui n'est pas soumis à des notations annuelles.
12 novembre 1994. Pour moi, 11ème anniversaire de mariage !
A partir de cette date notre lutte ne sera plus la même.
Avant nous luttions pour rester ensemble, pour essayer de tenir le coup jusqu'en 2002, date à laquelle nous pourrions nous marier et faire de beaux bébés.
Mais ensuite, ce sera différent. Car il s'agira désormais ni plus ni moins de survivre, face aux coups de massue répétés que notre tortionnaire va nous infliger. Finis les projets à long terme, même à moyen terme, nous devrons désormais essayer de tenir jour après jour.
Le 12 novembre donc, notre tortionnaire passe au boulot, pour nous dire qu'il a prévu une réunion du personnel pour le jeudi 17. En ajoutant, le sourire carnassier aux lèvres, que nous n'allions pas trop être contents de ce qui allait en découler, certains de nos privilèges (sic) seraient dorénavant abolis.
C'est à cette occasion que j'apprendrai que la "réunionnite" à outrance est peut-être une des meilleurs méthodes de harcèlement qui soit. Je reviendrai - longuement - là-dessus, mais pour moi, de novembre 1994 à ... septembre 2006 (!) réunion rimera très souvent avec coups de bâton..
Quand notre tortionnaire quitte la pièce, Nat prend un rictus qui ne trompe pas. Et ses pleurs suivent. Quand à moi, je vais être pris d'un tremblement qui ne me quittera pas de la journée.
Il faudra appeler le médecin, qui me prescrira encore plus de médocs.
A partir de ce jour, ils vont de plus en plus prendre le pas chez moi, allant jusqu'à me transformer en parfait zombie. Partant de 6 comprimés quotidiens en cet automne 1994, je vais arriver à ...14 quelques mois plus tard : un coktail à base de Xanax, de Lexomil, de Prozac, de Rohypnol et de Témesta.
Effectivement, il avait eu raison de nous prévenir.
C'est l'artillerie lourde qui se déclenche ce jeudi 17 : D'abord, fini les journées ensemble. Dorénavant, il faudra que nous nous "mélangions" entre collègues. L'argument étant qu'il n'y ait pas de "clans".
Et pour mieux marquer cette frontière, Nat et moi seront interdits de ... pause-café le matin ! Seuls notre tortionnaire et nos deux autres collègues y auront droit.
Et ce sera l'occasion pour nous - désormais séparés - d'entendre lors de ces pauses-cafés des phrases peu amènes à notre sujet, chuchotées/marmonnées au cours de ces pauses, mais néanmoins parfaitement audibles.
Je suis conscient, en écrivant cela j'imagine que les lecteurs auront du mal à le croire. C'est vrai que dans les blogs j'ai vu pas mal d'histoires de harcèlement moral mais qui n'ont - heureusement - jamais atteint un tel degré.
Seconde décision : Obligation de prendre nos repas sur place.
Notre tortionnaire a vu que nous étions dépressifs, et a dû se renseigner sur le fait que pour un dépressif "la maison" est le refuge. Nous priver de cette "plage" entre deux séances de bombardements accélèrerait à coup sûr le processus.
Par chance, un collègue, habitant à 7 km de là, et ne voulant pas faire les frais de l'acharnement de Chef Adoré contre nous fera valoir qu'il n'y a pas de coin-cuisine pour manger sur place.
Et notre tortionnaire va aussitôt sauter sur l'occasion pour réaménager de fond en comble les locaux. Là aussi il fera fort... j'y reviendrai.
Il annonce aussi que ce type de réunion sera désormais mensuel, la réunion se passant après le travail, pouvant se prolonger jusque tard dans la soirée s'il y a lieu ! Aucune objection ne sera prise en compte, circulez y a rien à voir...
En écrivant ces lignes, je me remémore ces années. Et je comprends de plus en plus pourquoi, moi qui pardonne tout, qui pardonne trop, je serais aux anges si on m'annonçait un jour la disparition de ce type. Il y a six ans je m'interrogeais sur un forum "Suis-je un monstre" ? A présent que tout ça m'est revenu en mémoire, je peux répondre non sans hésitation.
(à suivre)
15:33 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : harcèlement
Le début des médocs (septembre 1994)
Nous digérons peu à peu le choc du 8. Enfin nous croyons digérer.
Nous nous baladerons beaucoup, essentiellement en Auvergne et surtout le Cantal.
Nous avons une prédilection pour les pédalos, grâce auxquels nous pourrons nous embrasser longuement à l'abri des regards. Du coup, nous connaissons tous les lacs de la région !
Pendant ce mois, nous avons bien sûr été danser. Le Déclic nous verra par deux fois. J'ai un tendre souvenir de la seconde fois : C'est la "série-tendresse", et nous dansons un slow, essayant de ne pas trop nous serrer. Passe alors "Il me dit que je suis belle", de Patricia Kaas. Version longue, près de 6 minutes.
Minutes pendant lesquelles nos défenses vont tomber, nos corps se laisser aller. Et nous entendrons distinctement une voix de femme - pas une Mendoise, une touriste, vu son accent - s'exclamer "mais regarde-moi ces deux-là, on dirait qu'ils font l'amour sur la piste..." !
Bref, en cette fin juillet, au vu des semaines passées, il semble évident que nous finirons notre vie ensemble... L'attente vaudra le coup.
Août est le mois des vacances. Pour mon épouse et moi un combiné Pays-Bas/Lille/Alsace/Lons le Saunier/Briançon, et pour elle... Briançon tout court. Dans un appartement qui m'appartient.
Mais ce mois d'août 1994 nous montrera à quel point nous sommes fragiles l'un sans l'autre. Nous nous téléphonerons presque chaque jour - d'une cabine, nous sommes en 1994 - pour nous remonter le moral.
Pour ma part, je me surprendrai en laissant ma fille à sa colo, comme les 4 années précédentes. Car aussitôt après l'avoir laissée, je vais pleurer sans interruption sur le trajet...
Ce jour-là marque pour moi très précisément le début de ma dépression. Laquelle, en ajoutant la maniaco qui allait suivre, ne durerait pas moins de 11 ans...
Dépression certes déclenchée par notre tortionnaire, mais le terrain était déjà bien préparé, par cet amour incroyable que je n'avais pas le droit de vivre encore. Par ces mensonges éhontés qu'il me fallait faire.
Septembre 1994, c'est le début des comprimés pour moi.
Car Nat, prétextant l'arrivée d'une vague cousine qu'elle n'avait jamais encore vue de sa vie, restera cloîtrée chez elle pendant 5 jours..
Du coup, crise de larmes, arrivée du toubib qui d'entrée me prescrit un traitement de cheval. Début de la spirale infernale...
Supplice inimaginable de la savoir juste en-dessous mais de ne pas pouvoir la voir.
En fait, elle aussi était entrée en dépression. En même temps que moi. Mais elle refusera les médocs, préférant le psy. Et cette fameuse semaine était en fait destinée à me cacher son état.
Deux ans qu'on se connaît, un an qu'on s'est déclarés, reste 8 pour la bague au doigt...
(à suivre)
11:50 Publié dans Merci | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : harcèlement, dépression
07/10/2010
L'heure de vérité (juillet 1994)
J'ai lu ici et là - également sur Hautetfort - des témoignages incroyables, qui me disent entre autres qu'ils n'ont pas osé aller trop loin avec l'objet de leur pensées.
On m'a souvent dit, quand j'ai eu le malheur de me confier, que finalement, je ne sais pas ce qu'aurait pu donner une vie à deux. Je ne connaissais que les "bons côtés" de cette relation, mais je n'avais pas subi le quotidien.
Ce fameux quotidien qui tue la majorité des couples.
Mais aussitôt je leur rétorquerai juillet 1994.
Juillet 1994 qui sera l'épreuve de vérité à ce sujet.
Toujours en mai, mon épouse fait une nouvelle crise. Inexpliquée celle-là, contrairement aux précédentes.
Nathalie, qui a une horreur absolue des hôpitaux, viendra quand même lui apporter un bouquet de fleurs. Nathalie qui elle aussi est écartelée, à la pensée de trahir cette femme qu'au fond elle estime.
Et chef adoré continue son travail de sape. Sans qu'on lui ait rien demandé, il introduit Windows dans le boulot. Double conséquence : nos poèmes seront écrasés si on ne les sauvegarde pas, et surtout, tout est à apprendre ! A commencer par admettre qu'une "souris" peut remplacer un clavier .
Pour vous faire une idée, c'est un peu la situation des conducteurs de locomotives à vapeur qui ont dû se reconvertir aux machines diesels ou électriques. Le métier était pourtant le même, mais la façon de le faire avait radicalement changé.
Beaucoup de démissions, de dépressions, ou de retraites anticipées ont eu lieu à cette époque-là à la SNCF.
Mais moi j'avais 43 ans, Nat 26, il nous fallait à tout prix passer par ces nouvelles technologies.
Une formation aurait été la bienvenue - c'était bien le moins - mais pour les "Mendois", rien de prévu :(
On continue dans la gaieté. Mon père m'apprend que sa filleule Annie, 39 ans, - qui fut ma camarade de jeux favorite durant mon enfance - vient de mourir, elle et son mari...
En cette mi-mai 1994, on comprendra que je ne suis pas au meilleur de ma forme...
Les masques vont tomber début juin. Chef adoré nous invite chez lui, afin de faire plus ample connaissance. Avec les conjoints évidemment. Ma seconde collègue - qui je l'ai dit connaissait l'oiseau - a décliné l'invitation, et Nat refuse d'y aller toute seule. On la comprendra aisément.
Ce repas sera carrément surréaliste. La tactique de chef adoré est de nous faire boire, tant et plus, afin qu'il sache ce qu'on a dans le ventre. Mais... en même temps qu'il nous sert, il SE sert !
Nat et moi avons compris la manoeuvre, de sorte que nous ne buvons qu'une gorgée tandis que chef adoré lui, s'enfile le verre entier. Puis s'empresse de nous le remplir.
Chef adoré a bien des défauts, mais il n'est pas alcoolique. Si bien que le résultat qu'il escompte va s'inverser, à savoir que si Nat et moi resterons assez "réservés", lui va s'épancher.
Et son "épanchement" ne sera pas triste... Il commencera par faire de grosses allusions sur Nat et moi, sous-entendant un chantage éventuel auprès de mon épouse. Puis, ayant épuisé le côté "personnel", il va s'attaquer au côté "boulot", où il nous annonce carrément que deux nouveaux ont arriver, qu'il a bien l'intention de refaire entièrement l'antenne de Mende avec eux deux, et que nous, les "archaïques" (sic) devrons nous soumettre ou nous démettre. Et, toujours sous l'emprise de l'alcool, nous conseillera vivement de demander une mutation !
Voilà. En ce mois de juin 94 le décor est planté.
Mais ma Nathalie va se montrer beaucoup plus forte que prévu. Non seulement elle ne baissera pas les bras, mais tiendra la dragée haute à chef adoré.
C''est... mon épouse qui va - involontairement - nous donner un coup de pouce. A savoir qu'elle envisage de partir 4 semaines chez elle en Normandie, son père venant d'avoir un accident. 4 semaines que je n'ai pas posées en congés - c'est prévu pour août - et que par conséquent je devrai passer à Mende...
En clair, un mois entier ensemble, Nat et moi. Et ça, mon épouse le sait parfaitement.
Un mois où l'on a prévu de vivre "ensemble", chez elle, mais aussi éventuellement chez moi, et pendant ce mois de juillet nous pourrons nous tester au quotidien, ce quotidien qui tue bien des couples naissants.
Certes, les beaux sentiments c'est facile quand les questions basiques ne se posent pas, comme la cuisine, la vaisselle, le ménage, les courses, la lessive, le repassage...
Et bien ce challenge-là, Nat et moi on se promet de le tenir pendant ce mois de juillet, à l'issue duquel on verra si le mariage est toujours d'actualité.
Soit ça passe, soit ça casse. Inutile de continuer à faire de beaux projets - le mariage, les beaux bébés - avec tous les boulets que nous traînons, si nous ne sommes finalement qu'un couple occasionnel de "cinq à sept".
Et la machine à broyer va de nouveau frapper un grand coup.
Après avoir assommé Nathalie le 12 mai, c'est à présent sur moi que l'attaque va se porter.
Et pas dans la dentelle.
C'est très exactement le 8 juillet que cela va se produire. Après une semaine en couple que je qualifierai de réussie.
Chef adoré est une fois de plus fin bourré. Et, alors que je parle du travail de la vacataire - avec qui tout le monde a couché sauf moi - qui n'est ni fait ni à faire, il rugit.
"Parce que tu crois que ton travail à toi il est bon ? C'est de la m... ce que tu fais ! Sans parler de ta personnalité, tu n'es au fond qu'un sale hypocrite".
Je ne bronche pas. Partant du principe que se faire insulter par un imbécile est un plaisir de fin gourmet.
Il le voit, et change alors de registre. Tape alors où ca fait mal.
"De toutes façons, Nathalie et toi vous êtes aussi mauvais l'un que l'autre, aussi hypocrites, vous faites bien la paire".
Là, je m'apprête à répliquer, et c'est alors qu'il me saisit par les épaules (1m95, carrure de catcheur) et hurle qu'il en a maaarre de nous deux.
Menace physique, là, je suis dépassé, je suis choqué, et je file dehors en pleurant et en claquant la porte vitrée, qui se brise en mille morceaux.
Et je le vois alors sortir en beuglant :
"Tu me la rembourseras cette porte, je te le promets... Allez, va chialer, petit con"...
Puis je croise Nat qui me voit dans cet état, me demande pourquoi, et je ne pourrai que montrer le bureau du doigt.
"Ne t'inquiète pas, j'y vais" me dit-elle en m'embrassant sur la joue.
Elle aussi se fera traiter de tous les noms, d'une façon incroyable. Elle aussi ressortira du bureau en pleurant, ce qui fera sa joie. Car je l'apprendrai dans les mois qui suivront, son pied, à ce monsieur, c'est de voir Nat pleurer...
Le soir, nous irons pique-niquer à 20 km, pour nous changer les idées, et en quelque sorte faire le point.
Le point sur notre situation, sur notre pauvre couple qui s'aime éperdument et qui est menacé de tous côtés...
Mais durant les trois semaines qui vont suivre, nous allons bien gérer le quotidien, chacun se répartissant les rôles (vaisselle, aspirateur, lessive, commissions) malgré les bombes qui de tous les côtés viennent s'écraser sur nous.
En cette fin juillet 1994, nous pensons alors qu'hors catastrophe, nous sommes capables de vivre ensemble, et pas seulement un "cinq à sept".
Hors catastrophe certes mais aussi - nous le saurons plus tard - pas dans la clandestinité...
Je vous embrasse
14:41 Publié dans moi | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : harcèlement